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Avis juridique important

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61995J0370

Arrêt de la Cour (cinquième chambre) du 26 juin 1997. - Careda SA (C-370/95), Federación nacional de operadores de máquinas recreativas y de azar (Femara) (C-371/95) et Asociación española de empresarios de máquinas recreativas (Facomare) (C-372/95) contre Administración General del Estado. - Demande de décision préjudicielle: Audiencia Nacional - Espagne. - Taxes sur l'exploitation d'appareils de jeu - Taxe sur le chiffre d'affaires - Répercussion sur le consommateur. - Affaires jointes C-370/95, C-371/95 et C-372/95.

Recueil de jurisprudence 1997 page I-03721


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


Dispositions fiscales - Harmonisation des législations - Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Interdiction de percevoir d'autres impôts nationaux ayant le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires - Objectif - Notion de «taxes sur le chiffre d'affaires» - Taxe sur les jeux et paris répercutée sur le consommateur, sa répercussion ne faisant pas l'objet d'une mention expresse dans la loi nationale ni n'étant consignée dans une facture ou un document en tenant lieu - Inclusion

(Directive du Conseil 77/388, art. 33)

Sommaire


L'objectif de l'article 33 de la sixième directive 77/388 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires étant d'empêcher que le fonctionnement du système commun de la taxe sur la valeur ajoutée soit compromis par les mesures fiscales d'un État membre grevant la circulation des biens et des services, et frappant les transactions commerciales d'une façon comparable à la taxe sur la valeur ajoutée, la qualification d'une taxe nationale et, partant, l'appréciation de sa compatibilité avec le droit communautaire doivent s'opérer non seulement en fonction du libellé des dispositions nationales applicables, mais également en fonction de ses caractéristiques essentielles, et, notamment, de la possibilité de la répercuter sur le consommateur. Il s'ensuit que pour qu'une taxe nationale ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, il n'est pas nécessaire que la législation nationale qui lui est applicable prévoie expressément la possibilité de la répercuter sur les consommateurs.

En outre, pour qu'une telle taxe ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, il n'est pas nécessaire que sa répercussion sur les consommateurs soit consignée dans une facture ou un document en tenant lieu. Aux fins de l'application de la disposition précitée, il appartient au juge national de vérifier si l'imposition litigieuse est de nature à grever la circulation des biens et des services d'une façon comparable à la taxe sur la valeur ajoutée, et ce en examinant si elle présente les caractéristiques essentielles de celle-ci. Tel sera le cas si elle présente un caractère de généralité, si elle est proportionnelle au prix des services, si elle est perçue à chaque stade du processus de production et de distribution, et si elle s'applique sur la valeur ajoutée des services.

Parties


Dans les affaires jointes C-370/95, C-371/95 et C-372/95,

ayant pour objet des demandes adressées à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE, par l'Audiencia Nacional (Espagne) et tendant à obtenir, dans les litiges pendants devant cette juridiction entre

Careda SA (C-370/95),

Federación nacional de operadores de máquinas recreativas y de azar (Femara) (C-371/95),

Asociación española de empresarios de máquinas recreativas (Facomare)(C-372/95)

et

Administración General del Estado,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 33 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1),

LA COUR

(cinquième chambre),

composée de MM. J. C. Moitinho de Almeida, président de chambre, C. Gulmann, D. A. O. Edward, J.-P. Puissochet et M. Wathelet (rapporteur), juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: M. H. A. Ruehl, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour Careda SA et Federación nacional de operadores de máquinas recreativas y de azar (Femara), par M. Miguel Ángel García Campos, avocat au barreau de Madrid,

- pour le gouvernement espagnol, par M. Alberto José Navarro González, directeur général de la coordination juridique et institutionnelle communautaire, assisté de Mme Gloria Calvo Díaz, abogado del Estado, du service juridique de l'État, en qualité d'agents,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. Miguel Díaz-Llanos La Roche, membre du service juridique, en qualité d'agent,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de Careda SA et de Federación nacional de operadores de máquinas recreativas y de azar (Femara), représentées par M. Miguel Ángel García Campos, assisté de M. Zornoza Pérez, professeur de droit à l'université Carlos III de Madrid, du gouvernement espagnol, représenté par M. Luis Pérez de Ayala Becerril, abogado del Estado, du service juridique de l'État, en qualité d'agent, et de la Commission, représentée par M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, en qualité d'agent, à l'audience du 16 janvier 1997,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 27 février 1997,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par ordonnances des 4 juillet (C-370/95), 13 septembre (C-371/95) et 15 novembre (C-372/95) 1995, parvenues à la Cour le 30 novembre 1995, l'Audiencia Nacional a posé, en application de l'article 177 du traité CE, deux questions préjudicielles relatives à l'interprétation de l'article 33 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (JO L 145, p. 1, ci-après la «sixième directive»).

2 Ces questions ont été soulevées dans le cadre d'un litige opposant Careda SA (ci-après «Careda») à l'Administración General del Estado (ministère de l'Économie et des Finances espagnol) au sujet d'un avis d'imposition au titre de la taxe complémentaire à la taxe fiscale sur les jeux de chance, les paris et les jeux de hasard, telle que prévue par l'article 38, paragraphe 2, point 2, de la loi n_ 5/1990, du 29 juin 1990 (BOE du 30 juin 1990, ci-après la «loi n_ 5/1990»), et de deux recours en annulation intentés par la Federación nacional de operadores de máquinas recreativas y de azar (ci-après la «Femara») et l'Asociación española de empresarios de máquinas recreativas (ci-après «Facomare») à l'encontre de l'arrêté ministériel n_ 23472, du 6 septembre 1990 (BOE du 22 septembre 1990, ci-après l'«arrêté du 6 septembre 1990»), lequel constitue une partie de la base juridique de ladite taxe.

3 Le décret-loi royal n_ 16/1977, du 25 février 1977 (BOE du 7 mars 1977, ci-après le «décret-loi n_ 16/1977»), réglemente les aspects pénaux, administratifs et fiscaux des jeux de chance, des paris ou des jeux de hasard en Espagne. Il a notamment institué une taxe fiscale sur ces derniers (ci-après la «taxe sur le jeu») dont le régime est défini à l'article 3 dans les termes suivants:

«Article 3. Indépendamment des impôts nationaux et locaux auxquels elles sont soumises conformément à la législation en vigueur, les sociétés ou entreprises exerçant les activités visées par le présent décret-loi royal, les casinos et les autres établissements, installations ou lieux autorisés pour le jeu, sont soumis à la taxe fiscale sur les [jeux], dans les conditions suivantes:

1_ Fait imposable: le fait imposable est constitué par l'autorisation ou l'organisation de jeux de hasard.

2_ Assujettis: sont assujettis à la taxe les organisateurs et les entreprises dont les activités comprennent l'organisation de jeux de hasard.

Les propriétaires et les exploitants des locaux où ces jeux sont organisés sont solidairement responsables du paiement de la taxe.

3_ Base d'imposition: la base d'imposition est constituée par les recettes brutes que les casinos retirent du jeu ou par les montants que les joueurs consacrent à leur participation aux jeux qui ont lieu dans les différents locaux, installations ou lieux où sont organisés les jeux de chance, les paris ou les jeux de hasard.

La base d'imposition est déterminée directement ou forfaitairement. Dans le premier cas, l'assujetti est tenu d'acquitter la taxe sous la forme et dans les cas déterminés par voie de règlement.

4_ Taux d'imposition: le taux d'imposition est:

a) pour les casinos ...

b) pour les autres locaux, installations ou lieux: 20 % de la base d'imposition.

...

5_ Fait générateur

1. L'obligation de payer la taxe prend naissance, de manière générale, au moment de l'autorisation ou, à défaut, de l'organisation du jeu.

2. Dans le cas de machines ou d'appareils automatiques destinés aux jeux de hasard, la taxe est exigible par années civiles et due au 1er janvier de chaque année pour les appareils autorisés les années précédentes. (...)»

4 L'article 3, paragraphe 4, du décret-loi nº 16/1977 a fait l'objet de plusieurs modifications. Ainsi, pour les appareils de jeu avec possibilité de gains, dits de type «B», le taux d'imposition est devenu un tarif fixe. Ce taux a été actualisé par l'article 38, paragraphe 2, point 1, de la loi n_ 5/1990 comme suit:

«Tarifs fixes: ...

A) Appareils de jeu avec possibilité de gains ou du type `B':

a) tarif annuel: 375.000 pesetas.

b) [adaptation des tarifs selon qu'il s'agit d'appareils à deux ou à trois joueurs et plus]».

5 L'article 38, paragraphe 2, point 2, de la loi n_ 5/1990 a par ailleurs instauré, pour la seule année 1990, une taxe complémentaire applicable notamment aux appareils de type «B» (ci-après la «taxe complémentaire»).

6 Le montant de la taxe complémentaire est égal, conformément à la même disposition, à la différence entre les tarifs fixes établis au point 1 du même paragraphe et ceux déterminés par le décret-loi n_ 7/1989, du 29 décembre 1989 (BOE du 30 décembre 1989, p. 8325). Les montants à percevoir au titre de la taxe complémentaire ont, en outre, été précisés par l'arrêté ministériel du 6 septembre 1990.

7 Dans le cadre des recours qu'elles ont intentés devant l'Audiencia Nacional, Careda, Femara et Facomare ont soutenu que la taxe complémentaire perçue au titre de l'arrêté ministériel du 6 septembre 1990 était contraire à l'article 33 de la sixième directive en ce qu'elle présentait les mêmes qualités et caractéristiques essentielles que la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA»).

8 Aux termes de l'article 13, partie B, sous f), de la sixième directive,

«Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels:

...

f) les paris, loteries et autres jeux de hasard ou d'argent, sous réserve des conditions et limites déterminées par chaque État membre;

...».

9 L'article 33 de la sixième directive, dans sa version en vigueur à l'époque des faits, prévoyait toutefois:

«Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les dispositions de la présente directive ne font pas obstacle au maintien ou à l'introduction par un État membre de taxes sur les contrats d'assurance, sur les jeux et paris, d'accises, de droits d'enregistrement et, plus généralement, de tous impôts, droits et taxes n'ayant pas le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires.»

10 Afin d'apprécier la compatibilité avec le droit communautaire de la taxe litigieuse et, plus précisément, de la loi n_ 5/1990 et de l'arrêté du 6 septembre 1990, qui lui servent de base légale, l'Audiencia Nacional a estimé utile de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

1) «En tant qu'élément entrant dans la notion de taxe sur le chiffre d'affaires, la notion de répercussion de la taxe sur le consommateur, au sens de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai et des autres dispositions de l'ordre juridique communautaire, présuppose-t-elle toujours et en toute hypothèse que la législation applicable à l'imposition établisse expressément que celle-ci est susceptible d'être répercutée sur le consommateur ou suffit-il au contraire que cette imposition puisse, dans une interprétation raisonnable de cette législation, être considérée comme de facto incluse dans le prix payé par le consommateur?»

2) «Lorsqu'elle est en définitive payée par le consommateur, une imposition à tarif fixe, d'un montant élevé par rapport au total des recettes ou du chiffre d'affaires et qui tient compte de ces recettes, peut-elle être considérée comme une taxe sur le chiffre d'affaires, même si la répercussion sur le consommateur n'est expressément consignée (facture) nulle part, parce qu'il s'agit de transactions automatiques, effectuées avec des pièces de monnaie et pour un prix d'utilisation déterminé? Une telle imposition est-elle incompatible avec la sixième directive 77/388/CEE relative à la taxe sur la valeur ajoutée, en tant qu'elle viole l'article 33 de cette directive?»

Sur la première question

11 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 33 de la sixième directive doit être interprété en ce sens que, pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, la législation nationale qui lui est applicable doit expressément prévoir qu'elle puisse être répercutée sur les consommateurs.

12 Pour répondre à cette question, il convient tout d'abord d'examiner si la notion de taxe sur le chiffre d'affaires, au sens de l'article 33 de la sixième directive, implique nécessairement que la taxe puisse être répercutée sur le prix des biens ou des services de telle sorte qu'elle soit supportée, en définitive, par le consommateur.

13 Selon une jurisprudence constante (voir, notamment, arrêts du 27 novembre 1985, Rousseau Wilmot, 295/84, Rec. p. 3759, point 16, et du 7 mai 1992, Bozzi, C-347/90, Rec. p. I-2947, point 9), l'article 33 de la sixième directive, en laissant la liberté aux États membres de maintenir ou d'introduire certaines taxes indirectes, telles les accises, à condition qu'il ne s'agisse pas de taxes «ayant ... le caractère de taxes sur le chiffre d'affaires», a pour but d'empêcher que le fonctionnement du système commun de TVA soit compromis par les mesures fiscales d'un État membre grevant la circulation des biens et des services, et frappant les transactions commerciales d'une façon comparable à la TVA.

14 Doivent en tout cas être considérés comme de telles mesures les impôts, droits et taxes qui présentent les caractéristiques essentielles de la TVA, même s'ils ne sont pas en tous points identiques à celle-ci. Ainsi que la Cour l'a déjà relevé à plusieurs reprises, ces caractéristiques sont les suivantes: la TVA s'applique de manière générale aux transactions ayant pour objet des biens ou des services; elle est proportionnelle au prix de ces biens et de ces services, quel que soit le nombre des transactions effectuées; elle est perçue à chaque stade du processus de production et de distribution; enfin, elle s'applique sur la valeur ajoutée des biens et des services, la taxe due lors d'une transaction étant calculée après déduction de celle qui a été payée lors de la transaction précédente (voir, notamment, arrêts du 3 mars 1988, Bergandi, 252/86, Rec. p. 1343, point 15; du 13 juillet 1989, Wisselink e. a., 93/88 et 94/88, Rec. p. 2671, point 18; du 19 mars 1991, Giant, C-109/90, Rec. p. I-1385, points 11 et 12; du 31 mars 1992, Dansk Denkavit et Poulsen Trading, C-200/90, Rec. p. I-2217, point 11, et Bozzi, précité, point 12). La Cour a également précisé dans l'arrêt Bergandi, précité, point 8, que, au regard de ses caractéristiques essentielles, la TVA est en définitive supportée par le consommateur final.

15 Il découle de ce qui précède que, pour avoir le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, au sens de l'article 33 de la directive, la taxe considérée doit pouvoir être répercutée sur le consommateur.

16 Il y a lieu à présent d'examiner si l'article 33 de la sixième directive requiert également, aux fins de qualifier une taxe de taxe sur le chiffre d'affaires, que la législation nationale qui lui est applicable prévoie expressément qu'elle puisse être répercutée sur les consommateurs.

17 A cet égard, il importe de souligner que, compte tenu de la finalité de l'article 33 de la sixième directive, telle que rappelée au point 13 du présent arrêt, la qualification d'une taxe et, partant, l'appréciation de sa compatibilité avec le droit communautaire doivent s'opérer non seulement en fonction du libellé des dispositions nationales applicables, mais également en fonction de ses caractéristiques essentielles.

18 Il convient donc de répondre à la première question que l'article 33 de la sixième directive doit être interprété en ce sens que, pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, il n'est pas nécessaire que la législation nationale qui lui est applicable prévoie expressément qu'elle puisse être répercutée sur les consommateurs.

Sur la seconde question

19 Par sa seconde question, la juridiction demande en substance si l'article 33 de la sixième directive doit être interprété en ce sens que, pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, il est nécessaire que sa répercussion sur les consommateurs soit consignée dans une facture ou un document en tenant lieu.

20 Il ressort du dossier que la délivrance aux utilisateurs des appareils de jeu d'une facture ou de tout autre document en tenant lieu n'est matériellement pas possible, en raison du caractère automatique et répétitif, dans un court laps de temps, de l'activité imposée.

21 En vertu de l'article 22, paragraphe 3, sous a), de la sixième directive, la délivrance d'une facture est obligatoire, d'une part, pour les livraisons de biens et les prestations de services effectuées par un assujetti pour un autre assujetti (premier alinéa) et, d'autre part, pour les acomptes versés à un assujetti par un autre assujetti, avant que la livraison ne soit effectuée ou que la prestation de services ne soit achevée (deuxième alinéa), sans préjudice de la faculté conférée aux États membres par l'article 22, paragraphe 8, de la même directive de prévoir d'autres obligations pour assurer l'exacte perception de la taxe et pour éviter la fraude.

22 En outre, pour pouvoir exercer le droit à déduction visé à l'article 17, paragraphe 2, sous a), de la sixième directive, l'article 18, paragraphe 1, sous a), de celle-ci prescrit la détention par l'assujetti d'une facture établie conformément à l'article 22, paragraphe 3.

23 Il résulte de ces dispositions que la détention ou la délivrance d'une facture n'est pas imposée, en toutes circonstances, par la directive, particulièrement, ainsi que le souligne M. l'avocat général au point 40 de ses conclusions, dans les relations entre les assujettis et le consommateur final. La détention ou la délivrance d'une facture ne saurait donc constituer une caractéristique essentielle de la taxe sur le chiffre d'affaires au sens de l'article 33 de la sixième directive.

24 Cela étant, il convient de rappeler que l'article 33 de la sixième directive a pour objet d'éviter que soient instaurés des impôts, droits et taxes compromettant le fonctionnement du système commun de la TVA.

25 En l'espèce au principal, il appartient donc au juge national de vérifier si l'imposition litigieuse est de nature à grever la circulation des biens et des services d'une façon comparable à la TVA, et ce en examinant si elle présente les caractéristiques essentielles de celle-ci. Tel sera le cas si elle présente un caractère de généralité, si elle est proportionnelle au prix des services, si elle est perçue à chaque stade du processus de production et de distribution et s'applique sur la valeur ajoutée des services, et si, vu ces conditions, elle peut être répercutée sur le consommateur.

26 Il convient donc de répondre à la seconde question que l'article 33 de la sixième directive doit être interprété en ce sens que, pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, il n'est pas nécessaire que sa répercussion sur les consommateurs soit consignée dans une facture ou un document en tenant lieu. Aux fins de l'application de cette disposition, il appartient, en tout état de cause, au juge national de vérifier si l'imposition litigieuse est de nature à grever la circulation des biens et des services d'une façon comparable à la TVA, et ce en examinant si elle présente les caractéristiques essentielles de celle-ci. Tel sera le cas si elle présente un caractère de généralité, si elle est proportionnelle au prix des services, si elle est perçue à chaque stade du processus de production et de distribution, et si elle s'applique sur la valeur ajoutée des services.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

27 Les frais exposés par le gouvernement espagnol ainsi que par la Commission des Communautés européennes, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(cinquième chambre),

statuant sur les questions à elle soumises par l'Audiencia Nacional, par ordonnances des 4 juillet, 13 septembre et 15 novembre 1995, dit pour droit:

1) L'article 33 de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme, doit être interprété en ce sens que, pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, il n'est pas nécessaire que la législation nationale qui lui est applicable prévoie expressément qu'elle puisse être répercutée sur les consommateurs.

2) L'article 33 de la sixième directive 77/388 doit être interprété en ce sens que, pour qu'une taxe ait le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, il n'est pas nécessaire que sa répercussion sur les consommateurs soit consignée dans une facture ou un document en tenant lieu. Aux fins de l'application de cette disposition, il appartient, en tout état de cause, au juge national de vérifier si l'imposition litigieuse est de nature à grever la circulation des biens et des services d'une façon comparable à la TVA, et ce en examinant si elle présente les caractéristiques essentielles de celle-ci. Tel sera le cas si elle présente un caractère de généralité, si elle est proportionnelle au prix des services, si elle est perçue à chaque stade du processus de production et de distribution, et si elle s'applique sur la valeur ajoutée des services.