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Avis juridique important

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61998J0229

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 14 octobre 1999. - Georges Vander Zwalmen et Elisabeth Massart contre Etat belge. - Demande de décision préjudicielle: Cour d'appel de Bruxelles - Belgique. - Fonctionnaires et agents des Communautés européennes - Impôt sur le revenu des personnes physiques - Imposition du conjoint d'un fonctionnaire communautaire. - Affaire C-229/98.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-07113


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


Privilèges et immunités des Communautés européennes - Fonctionnaires et agents des Communautés - Exemption d'impôts nationaux sur les traitements versés par les Communautés - Portée - Impôt sur les revenus des personnes physiques - Admissibilité

(Protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes, art. 13)

Sommaire


L'article 13 du protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes ne s'oppose pas à ce qu'un État membre, qui accorde un allégement fiscal aux ménages disposant d'un seul revenu et aux ménages disposant de deux revenus dont le second est inférieur à une somme donnée indexée, refuse ce bénéfice aux ménages dont un conjoint a la qualité de fonctionnaire ou d'agent des Communautés européennes lorsque son traitement est supérieur à ce montant.

En effet, la cause de l'exclusion du bénéfice réside non pas dans le fait d'être fonctionnaire communautaire percevant un salaire supérieur à ladite somme indexée, mais découle de la condition générale et objective, qui s'applique de manière non discriminatoire aux conjoints dont l'un est fonctionnaire comme à tout autre contribuable, quant au montant des revenus ouvrant droit au bénéfice en cause.

Parties


Dans l'affaire C-229/98,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par la Cour d'appel de Bruxelles (Belgique) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Georges Vander Zwalmen,

Élisabeth Massart

et

tat belge,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de l'article 13 du protocole du 8 avril 1965 sur les privilèges et immunités des Communautés européennes,

LA COUR

(sixième chambre),

composée de MM. R. Schintgen, président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la sixième chambre, P. J. G. Kapteyn (rapporteur), et G. Hirsch, juges,

avocat général: M. D. Ruiz-Jarabo Colomer,

greffier: Mme D. Louterman-Hubeau, administrateur principal,

considérant les observations écrites présentées:

- pour M. Vander Zwalmen et Mme Massart, par Mes X. Leurquin et M. Marlière, avocats au barreau de Bruxelles,

- pour le gouvernement belge, par M. J. Devadder, conseiller général au ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération au développement, en qualité d'agent, assisté de Me B. van de Walle de Ghelcke, avocat au barreau de Bruxelles,

- pour la Commission des Communautés européennes, par MM. É. Mennens, conseiller juridique principal, et H. P. Hartvig, conseiller juridique, en qualité d'agents,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de M. Vander Zwalmen et Mme Massart, du gouvernement belge et de la Commission à l'audience du 4 mars 1999,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 25 mars 1999,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par arrêt du 12 juin 1998, parvenu à la Cour le 26 juin suivant, la Cour d'appel de Bruxelles a posé, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), une question préjudicielle sur l'interprétation de l'article 13 du protocole du 8 avril 1965 sur les privilèges et immunités des Communautés européennes (ci-après le «protocole»).

2 Cette question a été posée dans le cadre d'un litige opposant M. Vander Zwalmen et Mme Massart à l'État belge.

Le cadre juridique

Le droit communautaire

3 L'article 13 du protocole dispose:

«Dans les conditions et suivant la procédure fixée par le Conseil statuant sur proposition de la Commission, les fonctionnaires et autres agents des Communautés sont soumis au profit de celles-ci à un impôt sur les traitements, salaires et émoluments versés par elles.

Ils sont exempts d'impôts nationaux sur les traitements, salaires et émoluments versés par les Communautés.»

Le droit national

4 La loi du 7 décembre 1988 portant réforme de l'impôt sur les revenus et modification des taxes assimilées au timbre (Moniteur belge du 16 décembre 1988) a introduit l'imposition séparée des revenus professionnels de chacun des conjoints. L'article 4, paragraphe 1, de cette loi prévoit que, «Lorsqu'un seul conjoint bénéficie de revenus professionnels, une quote-part (appelée `quotient conjugal') en est attribuée à l'autre conjoint. Cette quote-part est égale à 30 % de ces revenus sans pouvoir excéder 270 000 BEF». Selon le paragraphe 2 de cette disposition, «Lorsque les revenus professionnels d'un des conjoints ... n'atteignent pas 30 % des revenus professionnels des deux conjoints, il lui est attribué une quote-part des revenus professionnels de l'autre conjoint qui, jointe à ses propres revenus professionnels, lui permet d'atteindre 30 % de ce total sans pouvoir excéder 270 000 BEF».

5 Il ressort de l'arrêt de renvoi que, en instaurant le quotient conjugal, le législateur belge a souhaité favoriser fiscalement le mariage, la famille et les enfants et réaliser un effort supplémentaire en faveur des foyers disposant de revenus modestes. La mesure est en effet favorable aux ménages disposant d'un seul revenu et vise à revaloriser le travail au foyer d'un conjoint; elle bénéficie également aux ménages qui disposent de deux revenus dont l'un est relativement bas.

6 Par l'instauration du quotient conjugal est attribuée une quote-part des revenus du conjoint qui bénéficie des revenus professionnels les plus élevés à celui qui ne dispose pas de revenus professionnels ou qui dispose de revenus professionnels modestes. Cette quote-part est de 30 %, sans pour autant pouvoir excéder la somme indexée de 270 000 BEF. En créant cette masse séparée dans le chef du second conjoint, soumise à une imposition séparée, l'application des règles sur l'existence d'une quotité exemptée et sur les taux progressifs fait que le système du quotient conjugal conduit à un allégement fiscal pour le couple considéré dans sa réalité économique. Une imposition de l'intégralité des revenus professionnels de l'un des conjoints entraînerait en effet une imposition plus importante que l'addition des impositions séparées des 70 % et 30 % attribués de ces revenus.

7 Dans un premier temps, les termes «le conjoint ne bénéficiant pas de revenus professionnels» contenus dans la loi du 7 décembre 1988 étaient interprétés en ce sens qu'ils visaient le «conjoint ne bénéficiant pas de revenus professionnels soumis à l'impôt belge». Les pouvoirs publics et l'administration des contributions admettaient dès lors que les fonctionnaires internationaux qui ne bénéficiaient pas de l'exception de domicile fiscal et qui étaient donc soumis en principe à l'impôt sur le revenu des personnes physiques en Belgique, mais dont la rémunération était exonérée en vertu de conventions internationales, sans réserve de progressivité, bénéficiaient également du quotient conjugal.

8 En 1990, le législateur, s'étant rendu compte qu'il n'avait jamais été dans son intention d'attribuer le bénéfice du quotient conjugal aux fonctionnaires internationaux tels que les fonctionnaires communautaires dont les revenus sont exonérés d'impôt en Belgique sans réserve de progressivité, a supprimé ce bénéfice pour cette catégorie de personnes.

9 En effet, l'article 21 de la loi du 28 décembre 1990, relative à diverses dispositions fiscales et non fiscales (Moniteur belge du 29 décembre 1990), a complété l'article 1er de la loi du 7 décembre 1988, en ajoutant l'alinéa suivant: «Sont également considérés comme isolés, les contribuables dont le conjoint recueille des revenus professionnels qui sont exonérés conventionnellement et qui n'interviennent pas pour le calcul de l'impôt afférent aux autres revenus du ménage, pour un montant supérieur à 270 000 BEF.»

10 Depuis lors, la loi fiscale belge considère, en principe, les époux dont l'un est un fonctionnaire communautaire bénéficiant de revenus professionnels supérieurs à la somme de 270 000 BEF qui font l'objet d'une exonération conventionnelle non plus comme des conjoints, mais comme des isolés. Cette qualification implique que le bénéfice du quotient conjugal ne peut plus être pris en considération lors de leur imposition, en sorte que l'époux non fonctionnaire est imposé sur la base de la totalité de ses revenus professionnels.

11 En 1992, les différentes dispositions concernant les impôts sur les revenus ont été reprises sans modifications dans le code des impôts sur les revenus 1992 (Moniteur belge du 30 juillet 1992) dont les articles 87, 88 et 128 disposent:

Article 87

«Lorsque la cotisation est établie au nom des deux conjoints et qu'un seul des conjoints bénéficie de revenus professionnels, une quote-part est imputée à l'autre conjoint.

Cette quote-part est égale à 30 % de ces revenus sans pouvoir excéder 270 000 BEF.»

Article 88

«Lorsque la cotisation est établie au nom des deux conjoints et que les revenus professionnels d'un conjoint n'atteignent pas 30 % du total des revenus professionnels des deux conjoints, il lui est imputé une quote-part des revenus professionnels de l'autre conjoint qui, jointe à ses propres revenus professionnels, lui permet d'atteindre 30 % de ce total sans pouvoir excéder 270 000 BEF.»

Article 128

«Pour l'application de la présente section et le calcul de l'impôt, les personnes mariées sont considérées non comme des conjoints mais comme des isolés:

...

4_ lorsqu'un conjoint recueille des revenus professionnels qui sont exonérés conventionnellement et qui n'interviennent pas pour le calcul de l'impôt afférent aux autres revenus du ménage, pour un montant supérieur à 270 000 BEF.

Dans ces cas, deux impositions distinctes sont établies et l'impôt est déterminé, pour chacun des intéressés, sur la base de ses propres revenus et de ceux de ses enfants dont il a la jouissance légale.»

12 Le montant de 270 000 BEF a été porté à 288 000 BEF pour l'exercice d'imposition de l'année 1992 et à 297 000 BEF pour les exercices d'imposition des années 1993 et suivantes en raison de l'indexation.

Le litige au principal

13 M. Vander Zwalmen est soumis en Belgique à l'impôt sur le revenu des personnes physiques. Son épouse est fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes et a sa résidence fiscale en Belgique. Il n'est pas contesté que ses revenus professionnels sont, en vertu de l'article 13 du protocole, totalement exemptés en Belgique de l'impôt sur le revenu, sans réserve de progressivité.

14 Pour les exercices d'imposition relatifs aux années 1991 et 1992, le bénéfice du quotient conjugal n'a plus été accordé aux époux Vander Zwalmen, au motif que, au regard du droit fiscal résultant de la loi du 28 décembre 1990, ils ne pouvaient plus être considérés comme des conjoints, mais devaient être traités comme des isolés. Deux impositions distinctes ont dès lors été établies et l'impôt a été déterminé, pour chacun d'eux, sur la base de leurs propres revenus et de ceux des enfants dont ils avaient la jouissance légale.

15 En 1992 et 1993, M. Vander Zwalmen a introduit une réclamation à l'encontre des cotisations relatives à l'impôt sur le revenu des personnes physiques et aux taxes additionnelles auxquelles il avait été assujetti. Il a fait valoir que l'impôt avait été établi en violation de l'article 13 du protocole, au motif que son exclusion du bénéfice du quotient conjugal conduisait à une imposition indirecte des rémunérations exonérées de son épouse. Le 22 mai 1995, le directeur régional des contributions directes de Bruxelles II a rejeté sa réclamation. M. Vander Zwalmen a alors introduit un recours à l'encontre de cette décision devant la Cour d'appel de Bruxelles.

16 Devant cette juridiction, les requérants ont soutenu que, en considérant les conjoints dont l'un est un fonctionnaire des Communautés européennes qui dispose de revenus professionnels supérieurs à 270 000 BEF exonérés conventionnellement et qui n'interviennent pas pour le calcul de l'impôt afférent aux autres revenus du ménage comme des isolés et en fixant pour chacun d'eux des impositions distinctes sur la base de leurs propres revenus et de ceux de leurs enfants dont ils ont la jouissance légale, le législateur taxait indirectement, par l'article 21 de la loi du 28 décembre 1990, une partie des revenus exonérés par convention et méconnaissait ainsi l'article 13 du protocole.

17 Dans ces conditions, la Cour d'appel de Bruxelles a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«L'article 13 du protocole sur les privilèges et immunités des Communautés européennes doit-il être interprété en ce sens:

qu'il interdit aux États membres, dans le cadre de la législation fiscale applicable à l'impôt des personnes, de créer, pour l'imposition des conjoints et de leurs enfants, une catégorie distincte de contribuables en raison du fait que l'un d'eux est fonctionnaire européen, bénéficiant à ce titre de revenus professionnels conventionnellement exonérés sans réserve de progressivité, et d'établir pour cette catégorie deux cotisations distinctes par lesquelles l'impôt est déterminé pour chacun d'eux, sur base de ses propres revenus et de ceux de ses enfants dont il a la jouissance légale, tout en demeurant, le cas échéant, solidairement redevables de la dette d'impôt du ménage, alors que, pour les conjoints dont l'un ne dispose pas de revenus professionnels imposables, ou de revenus professionnels dérisoires, en vertu du droit national, la cotisation est établie au nom des deux conjoints, que, à l'exception des revenus professionnels, les revenus des conjoints sont cumulés avec les revenus de celui des conjoints qui en a le plus et que, lorsque les revenus d'un conjoint n'atteignent pas 30 % du total des revenus professionnels des deux conjoints, il lui est imputé une quote-part des revenus professionnels de l'autre conjoint qui, jointe à ses propres revenus professionnels, lui permet d'atteindre 30 % de ce total sans pouvoir excéder 270 000 BEF (indexé) ce qui peut résulter, par le biais de la progressivité des taux d'imposition, dans une réduction d'impôt dans le chef des conjoints?

qu'il interdit à un État membre de refuser, par le biais de l'imposition distincte décrite sous le n_ 1, le bénéfice du quotient conjugal en faveur du conjoint d'un fonctionnaire européen, à l'exception de ceux qui déclarent bénéficier de revenus professionnels conventionnellement exonérés sans réserve de progressivité inférieurs à 270 000 BEF (indexé), qui ne dispose pas de revenus non exonérés suffisamment importants pour que le bénéfice du quotient conjugal soit totalement compensé par l'impôt dû en vertu du cumul des revenus des conjoints et la progressivité des taux d'imposition?»

Sur la première partie de la question préjudicielle

18 Par la première partie de sa question, la juridiction de renvoi demande en substance si l'article 13 du protocole s'oppose à ce qu'un État membre, qui accorde un allégement fiscal aux ménages disposant d'un seul revenu et aux ménages disposant de deux revenus dont le second est inférieur à la somme indexée de 270 000 BEF, refuse ce bénéfice aux ménages dont un conjoint a la qualité de fonctionnaire ou d'agent des Communautés européennes lorsque son traitement est supérieur à ce montant.

19 Il y a lieu de relever tout d'abord qu'il ressort du dossier au principal que le bénéfice du quotient conjugal n'a pas été refusé au conjoint fonctionnaire, qui n'a subi aucune imposition directe de ses revenus exemptés, mais à son époux, non fonctionnaire, dont l'assujettissement à la loi fiscale belge n'a pas été mis en cause.

20 Selon les requérants au principal, le refus, et l'imposition en résultant, reviendrait en revanche à imposer de manière indirecte les revenus communautaires qui en sont exemptés en vertu de l'article 13 du protocole, en ce qu'il conduirait à une imposition plus élevée du couple considéré dans sa réalité économique.

21 À cet égard, il convient de rappeler que l'article 13 du protocole ne se limite pas aux impositions nationales fondées directement sur les traitements, salaires ou émoluments versés par les Communautés à leurs fonctionnaires ou autres agents, mais que l'exemption s'étend également à toute imposition indirecte (voir arrêts du 16 décembre 1960, Humblet, 6/60, Rec. p. 1125, 1158; du 24 février 1988, Commission/Belgique, 260/86, Rec. p. 955, point 10, et du 22 mars 1990, Tither, C-333/88, Rec. p. I-1133, point 12).

22 La juridiction de renvoi soulève la question de savoir si l'interdiction de toute imposition indirecte s'oppose à ce que les rémunérations des fonctionnaires des Communautés européennes soient prises en considération, à quelque titre que ce soit, par les législations fiscales des États membres, ces rémunérations devant être totalement négligées du point de vue du droit fiscal interne, comme si elles n'existaient pas.

23 À cet effet, il y a lieu d'examiner la portée de la notion «exempts d'impôts nationaux», telle que prescrite à l'article 13 du protocole.

24 Selon une jurisprudence constante, l'article 13 du protocole restreint la souveraineté fiscale des États membres, en ce qu'il s'oppose à toute imposition nationale, quelles que soient sa nature ou ses modalités de perception, qui a pour effet de grever, directement ou indirectement, les fonctionnaires ou autres agents des Communautés, en raison du fait qu'ils sont bénéficiaires d'une rémunération versée par les Communautés, même si l'impôt en cause n'est pas calculé en proportion du montant de cette rémunération (arrêts Commission/Belgique, précité, point 10; Tither, précité, point 12, et du 25 mai 1993, Kristoffersen, C-263/91, Rec. p. I-2755, point 14).

25 Si le droit communautaire s'oppose à ce qu'un fonctionnaire soit imposé plus lourdement quant à ses revenus non exonérés du fait qu'il perçoit un traitement de la Communauté (arrêt Humblet, précité, p. 1160), l'article 13 du protocole ne fait toutefois pas obligation aux États membres d'accorder aux fonctionnaires les mêmes subventions qu'aux bénéficiaires définis selon les dispositions nationales applicables. Cet article exige seulement que, lorsqu'une telle personne est soumise à certaines taxes, elle puisse bénéficier de tout avantage fiscal normalement ouvert aux assujettis, afin d'éviter qu'elle soit soumise à une charge fiscale plus élevée (arrêt Tither, précité, point 15), sans pour autant imposer un traitement privilégié.

26 Il en résulte que les conditions donnant droit à un avantage fiscal doivent s'appliquer de manière non discriminatoire aux ayants droit des fonctionnaires communautaires comme à tous autres contribuables (voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 1974, Brouerius van Nidek, 7/74, Rec. p. 757, point 14). Dans la mesure où les fonctionnaires remplissent les conditions de la législation nationale, ils doivent pouvoir bénéficier des avantages fiscaux y prévus; par conséquent, l'article 13 du protocole s'oppose au refus du droit à un tel avantage au seul motif de la qualification comme fonctionnaire non soumis à l'impôt des personnes physiques (arrêt Commission/Belgique, précité, point 12).

27 Il ressort toutefois des dispositions applicables dans l'affaire au principal que la législation fiscale belge soumet l'octroi du bénéfice du quotient conjugal à la condition objective que le conjoint de l'assujetti ne dispose d'aucun revenu professionnel, ou de revenus professionnels faibles, avec un maximum de 270 000 BEF, indexé. En cas de revenus professionnels plus élevés, le bénéfice du quotient conjugal ne peut pas être accordé et les conjoints seront soumis au système d'imposition séparée de leurs revenus.

28 Même si le législateur belge a introduit en 1990 une fiction selon laquelle les conjoints doivent être considérés comme des isolés lorsque l'un d'eux recueille des revenus professionnels exonérés par le protocole supérieurs à 270 000 BEF, ceci ne revient pas pour autant à l'introduction d'une condition supplémentaire contraire à l'article 13 du protocole. La cause de l'exclusion du bénéfice réside, en effet, non pas dans le fait d'être fonctionnaire communautaire percevant un salaire supérieur à 270 000 BEF, mais découle de la condition générale, qui s'applique de manière non discriminatoire aux conjoints dont l'un est fonctionnaire comme à tout autre contribuable, quant au montant des revenus ouvrant droit au bénéfice en cause. Cette condition remplie, le conjoint du fonctionnaire communautaire pourrait dès lors, le cas échéant, tout comme toute autre personne assujettie à la loi fiscale belge, bénéficier de cet avantage fiscal.

29 Il y a donc lieu de répondre à la première partie de la question que l'article 13 du protocole ne s'oppose pas à ce qu'un État membre, qui accorde un allégement fiscal aux ménages disposant d'un seul revenu et aux ménages disposant de deux revenus dont le second est inférieur à la somme indexée de 270 000 BEF, refuse ce bénéfice aux ménages dont un conjoint a la qualité de fonctionnaire ou d'agent des Communautés européennes lorsque son traitement est supérieur à ce montant.

Sur la seconde partie de la question préjudicielle

30 Par la seconde partie de sa question, la juridiction de renvoi demande en substance si une comparaison des conséquences fiscales du statut d'isolé, d'une part, et du statut de conjoint, d'autre part, doit être effectuée lors de l'examen du caractère licite ou non de la qualification d'isolé dans le cas d'espèce.

31 Eu égard à la réponse apportée à la première partie de la question posée, il n'y a plus lieu de répondre à cette partie de la question.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

32 Les frais exposés par le gouvernement belge ainsi que par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(sixième chambre),

statuant sur la question à elle soumise par la Cour d'appel de Bruxelles, par arrêt du 12 juin 1998, dit pour droit:

L'article 13 du protocole du 8 avril 1965 sur les privilèges et immunités des Communautés européennes ne s'oppose pas à ce qu'un État membre, qui accorde un allégement fiscal aux ménages disposant d'un seul revenu et aux ménages disposant de deux revenus dont le second est inférieur à la somme indexée de 270 000 BEF, refuse ce bénéfice aux ménages dont un conjoint a la qualité de fonctionnaire ou d'agent des Communautés européennes lorsque son traitement est supérieur à ce montant.