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Avis juridique important

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61999J0073

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 6 juillet 2000. - Viktor Movrin contre Landesversicherungsanstalt Westfalen. - Demande de décision préjudicielle: Sozialgericht Münster - Allemagne. - Sécurité sociale - Traité CE - Règlement (CEE) nº 1408/71 du Conseil - Titulaire de pensions de retraite - Assurance maladie obligatoire dans l'Etat membre de résidence - Contribution - Attribution par la législation d'un autre Etat membre. - Affaire C-73/99.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-05625


Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés


1 Sécurité sociale des travailleurs migrants - Réglementation communautaire - Champ d'application matériel - Allocation versée au profit des titulaires de pension et destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie - Inclusion

(Règlement du Conseil n_ 1408/71, art. 1er, t))

2 Sécurité sociale des travailleurs migrants - Prestations - Clauses de résidence - Levée - Application aux allocations versées aux titulaires de pension et destinées à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie

(Règlement du Conseil n_ 1408/71, art. 1er, t), et 10, § 1)

Sommaire


1 Constitue une prestation au sens de l'article 1er, sous t), du règlement n_ 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n_ 118/97, une allocation prévue par la réglementation d'un État membre qui est accordée par les institutions de l'assurance pension et qui vise à compléter les prestations de vieillesse de manière à contribuer au paiement des cotisations d'assurance maladie en vue d'alléger la charge que représentent ces dernières pour le titulaire de la pension. La circonstance que les versements soient effectués directement en faveur de l'organisme d'assurance maladie plutôt qu'en faveur du titulaire de la pension affilié à titre obligatoire au régime d'assurance maladie en question ne change rien à la constatation déterminante que ces versements sont effectués au profit du titulaire de la pension et qu'ils ont pour effet de majorer le montant de sa pension en vue de compenser la charge que constitue pour lui le paiement de cotisations. (voir points 40, 43)

2 Les articles 1er, sous t), et 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n_ 118/97, doivent être interprétés en ce sens qu'une allocation prévue par la réglementation d'un État membre, qui vise à compléter les prestations de vieillesse de manière à contribuer au paiement des cotisations d'assurance maladie en vue d'alléger la charge que représentent ces dernières pour le titulaire de la pension, en ce qu'elle se concrétise par une augmentation du niveau de la pension, constitue une prestation en espèces de vieillesse, au sens de ces dispositions, à laquelle le bénéficiaire d'une pension de vieillesse due au titre de ladite réglementation peut prétendre, même s'il réside dans un autre État membre dans lequel il est soumis à l'assurance maladie obligatoire. (voir points 40, 44, 52 et disp.)

Parties


Dans l'affaire C-73/99,

ayant pour objet une demande adressée à la Cour, en application de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), par le Sozialgericht Münster (Allemagne) et tendant à obtenir, dans le litige pendant devant cette juridiction entre

Viktor Movrin

et

Landesversicherungsanstalt Westfalen,

une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation du traité CE et du règlement (CEE) n_ 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n_ 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996 (JO 1997, L 28, p. 1),

LA COUR

(sixième chambre),

composée de MM. J. C. Moitinho de Almeida (rapporteur), président de chambre, R. Schintgen, C. Gulmann, J.-P. Puissochet et V. Skouris, juges,

avocat général: M. F. G. Jacobs,

greffier: M. H. von Holstein, greffier adjoint,

considérant les observations écrites présentées:

- pour M. Movrin, par Me G. Hesen, avocat à Aix-la-Chapelle,

- pour la Landesversicherungsanstalt Westfalen, par M. J. Försterling, directeur de celle-ci,

- pour le gouvernement allemand, par MM. W.-D. Plessing, Ministerialrat au ministère fédéral des Finances, et C.-D. Quassowski, Regierungsdirektor au même ministère, en qualité d'agents,

- pour la Commission des Communautés européennes, par M. P. Hillenkamp, conseiller juridique, en qualité d'agent, assisté de Me R. Karpenstein, avocat à Hambourg,

vu le rapport d'audience,

ayant entendu les observations orales de M. Movrin, du gouvernement allemand et de la Commission à l'audience du 13 janvier 2000,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 23 mars 2000,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt


1 Par ordonnance du 26 janvier 1999, parvenue à la Cour le 2 mars suivant, le Sozialgericht Münster a posé, en vertu de l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), une question relative à l'interprétation du traité CE et du règlement (CEE) n_ 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n_ 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996 (JO 1997, L 28, p. 1, ci-après le «règlement n_ 1408/71»).

2 Cette question a été soulevée dans le cadre d'un litige opposant M. Movrin, ressortissant néerlandais résidant aux Pays-Bas, à la Landesversicherungsanstalt Westfalen (office régional d'assurance du Land de Westphalie, ci-après la «LVA»), à propos du refus de cette dernière de lui accorder le bénéfice d'une allocation destinée à concourir au paiement des cotisations à son assurance maladie obligatoire aux Pays-Bas.

La réglementation communautaire

3 Selon l'article 1er, sous t), du règlement n_ 1408/71:

«Aux fins de l'application du présent règlement:

...

t) les termes `prestations', `pensions' et `rentes' désignent toutes prestations, pensions et rentes, y compris tous les éléments à charge des fonds publics, les majorations de revalorisation ou allocations supplémentaires, sous réserve des dispositions du titre III, ainsi que les prestations en capital qui peuvent être substituées aux pensions ou rentes et les versements effectués à titre de remboursement de cotisations».

4 L'article 3, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71 dispose:

«Les personnes qui résident sur le territoire de l'un des États membres et auxquelles les dispositions du présent règlement sont applicables sont soumises aux obligations et sont admises au bénéfice de la législation de tout État membre dans les mêmes conditions que les ressortissants de celui-ci, sous réserve de dispositions particulières contenues dans le présent règlement.»

5 Selon l'article 10, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n_ 1408/71:

«À moins que le présent règlement n'en dispose autrement, les prestations en espèces d'invalidité, de vieillesse ou de survivants, les rentes d'accident du travail ou de maladie professionnelle et les allocations de décès acquises au titre de la législation d'un ou de plusieurs États membres ne peuvent subir aucune réduction, ni modification, ni suspension, ni suppression, ni confiscation du fait que le bénéficiaire réside sur le territoire d'un État membre autre que celui où se trouve l'institution débitrice.»

6 Conformément à l'article 27 du règlement n_ 1408/71, qui figure au chapitre 1er, intitulé «Maladie et maternité», du titre III:

«Le titulaire de pensions ou de rentes dues au titre des législations de deux ou plusieurs États membres, dont celle de l'État membre sur le territoire duquel il réside, et qui a droit aux prestations au titre de la législation de ce dernier État membre, compte tenu, le cas échéant, des dispositions de l'article 18 et de l'annexe VI, ainsi que les membres de sa famille, obtiennent ces prestations de l'institution du lieu de résidence et à la charge de cette institution, comme si l'intéressé était titulaire d'une pension ou d'une rente due au titre de la seule législation de ce dernier État membre.»

7 Selon l'article 33, paragraphe 1, de ce règlement, qui figure au même chapitre:

«L'institution d'un État membre débitrice d'une pension ou d'une rente qui applique une législation prévoyant des retenues de cotisations à la charge du titulaire d'une pension ou d'une rente, pour la couverture des prestations de maladie et de maternité, est autorisée à opérer ces retenues, calculées suivant ladite législation, sur la pension ou la rente due par elle, dans la mesure où les prestations servies en vertu des articles 27, 28, 28 bis, 29, 31 et 32 sont à la charge d'une institution dudit État membre.»

La réglementation nationale

8 Selon l'article 23, paragraphe 1, point 1, sous e), du Sozialgesetzbuch Erstes Buch (code de la sécurité sociale, livre I, ci-après le «SGB I»), font partie des prestations de l'assurance pension légale les majorations destinées au règlement des cotisations d'assurance maladie.

9 Aux termes de l'article 249 a du Sozialgesetzbuch Fünftes Buch (code de la sécurité sociale, livre V, ci-après le «SGB V»):

«Les personnes assurées à titre obligatoire [au régime légal d'assurance maladie] qui perçoivent une pension versée par le régime légal d'assurance pension et les organismes d'assurance pension supportent respectivement pour moitié les cotisations à calculer en fonction de la pension.»

10 L'article 255, paragraphe 1, du SGB V est libellé comme suit:

«Les cotisations afférentes à la pension, qui sont à la charge des assujettis à l'assurance [maladie] obligatoire, sont retenues par les organismes d'assurance pension lors du versement de la pension et versées avec les cotisations supportées par lesdits organismes à la Bundesversicherungsanstalt für Angestellte [office fédéral des assurances des employés] pour les caisses de maladie à l'exclusion des caisses de maladie agricoles.»

11 L'article 106, paragraphe 1, du Sozialgesetzbuch Sechstes Buch (code de la sécurité sociale, livre VI, ci-après le «SGB VI»), dans sa version applicable dans le litige au principal, dispose:

«Les titulaires d'une pension qui sont affiliés à titre volontaire au régime légal d'assurance maladie ou assurés auprès d'une entreprise d'assurance maladie soumise au contrôle des autorités allemandes compétentes perçoivent, en plus de leur pension, une allocation destinée à concourir au règlement des dépenses d'assurance maladie. Cette disposition ne s'applique pas si les intéressés sont simultanément affiliés à titre obligatoire au régime légal de l'assurance maladie.»

12 L'article 106, paragraphe 2, du SGB VI, dans sa version en vigueur jusqu'au 31 décembre 1996, disposait:

«L'allocation mensuelle est égale au montant de la cotisation d'assurance maladie que l'organisme d'assurance pension doit prendre en charge pour les bénéficiaires de pension qui sont affiliés à titre obligatoire au régime légal d'assurance maladie. Elle est limitée à la moitié des dépenses effectives consacrées à l'assurance maladie. Lorsque des retraités perçoivent plusieurs pensions, une allocation limitée est versée par les organismes d'assurance pension, proportionnellement au montant des pensions. Elle peut aussi être servie sous forme d'une somme unique venant s'ajouter à l'une de ces pensions.»

13 L'article 106, paragraphe 2, du SGB VI, dans sa version en vigueur à compter du 1er janvier 1997, dispose:

«L'allocation mensuelle est égale à la moitié du montant qui résulte de l'application du taux de cotisation général moyen des caisses de maladie au montant de la pension. Ce taux est fixé au 1er janvier de chaque année par le ministère fédéral de la Santé, de façon unitaire pour tout le territoire fédéral. Il est arrondi à un chiffre après la virgule. Il est applicable du premier juillet de l'année civile en cours au 30 juin de l'année suivante. L'allocation mensuelle est limitée à la moitié des dépenses effectives consacrées à l'assurance maladie. Lorsque des retraités perçoivent plusieurs pensions, une allocation limitée est versée par les organismes d'assurance pension, proportionnellement au montant des pensions. Elle peut aussi être servie sous forme d'une somme unique venant s'ajouter à l'une de ces pensions.»

14 L'article 111, paragraphe 2, du SGB VI dispose, en ce qui concerne les bénéficiaires de pension qui ont leur résidence habituelle à l'étranger:

«Les bénéficiaires ne perçoivent pas d'allocation destinée à concourir aux dépenses d'assurance maladie et d'assurance dépendance.»

Le litige au principal

15 M. Movrin, qui a accompli des périodes d'assurance vieillesse en Allemagne, a perçu, à compter du 1er mars 1991, une pension d'invalidité allemande d'un montant net mensuel de 1 070,13 DEM. Par décision du 11 février 1993, il s'est vu octroyer, en outre, une allocation destinée à concourir au paiement de ses cotisations d'assurance maladie égale à 6,4 % de ladite pension.

16 Après que l'institution néerlandaise d'assurance, sise à Heerlen (Pays-Bas), eut indiqué à l'institution allemande que M. Movrin était assuré à titre obligatoire auprès du régime légal d'assurance maladie aux Pays-Bas, les retenues qui avaient été opérées au profit de la Krankenversicherung der Rentner (assurance maladie des pensionnés, ci-après la «KVdR») ont été reversées à M. Movrin, par décision de la LVA du 18 juin 1993, au motif qu'il était exonéré dans la mesure où il bénéficiait aux Pays-Bas d'une assurance maladie ayant primauté sur le régime allemand.

17 Par décision du 7 septembre 1995, la LVA a octroyé à M. Movrin, avec effet au 1er septembre 1995, une pension de vieillesse ordinaire d'un montant mensuel de 1 335,36 DEM au lieu de la pension d'invalidité servie jusqu'alors, l'intéressé ayant atteint l'âge de 65 ans.

18 M. Movrin perçoit en outre, depuis le 1er août 1995, une pension de vieillesse servie par l'institution néerlandaise d'assurance pension. Celle-ci retient, lors du paiement de sa pension, les cotisations d'assurance maladie qui sont calculées en tenant compte du montant cumulé de ses pensions de vieillesse néerlandaise et allemande. Par ailleurs, M. Movrin perçoit de l'institution néerlandaise une contribution destinée à compenser la charge de ces cotisations d'assurance maladie. Lors du calcul de cette contribution, il n'est pas tenu compte de la pension allemande de l'intéressé.

19 Par lettre du 21 novembre 1996, M. Movrin a sollicité, en vertu d'une application par analogie des articles 106 du SGB VI et 249 a du SGB V, lus en combinaison avec l'article 10 du règlement n_ 1408/71, le versement d'une allocation destinée à concourir au règlement de la part des cotisations à son assurance maladie aux Pays-Bas qui est due au titre de sa pension allemande. En tant que bénéficiaire d'une pension allemande, il a prétendu qu'il avait droit à l'allocation demandée et que lui refuser cette prestation violerait l'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71, ainsi que l'article 51 du traité CE (devenu, après modification, article 42 CE).

20 M. Movrin a souligné que tout retraité qui, en Allemagne, est affilié à titre obligatoire au régime légal d'assurance maladie se voit régler, conformément à l'article 249 a du SGB V, la moitié des cotisations d'assurance maladie, lesquelles sont calculées sur la base de la pension reçue au titre de l'assurance légale, et ce indépendamment de l'État membre dans lequel il réside. En outre, tout retraité qui est affilié à titre volontaire en Allemagne au régime légal d'assurance maladie ou qui a contracté une assurance maladie privée dans un État membre perçoit, conformément à l'article 106 du SGB VI, une allocation d'assurance représentant la moitié des cotisations d'assurance maladie en question, même s'il réside dans un autre État membre. Seuls sont exclus du bénéfice de cette allocation les retraités résidant dans un autre État membre et qui y sont affiliés à titre obligatoire au régime légal d'assurance maladie.

21 Selon M. Movrin, pareille situation est constitutive d'une violation du principe d'égalité de traitement inscrit à l'article 3, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71. Il a également relevé que, en vertu de l'article 10 du règlement n_ 1408/71, les prestations en espèces de vieillesse acquittées au titre de la législation d'un État membre ne peuvent être refusées du fait que le bénéficiaire réside sur le territoire d'un autre État membre. Par ailleurs, il serait inacceptable que les bénéficiaires d'une pension allemande qui sont assujettis à l'assurance maladie obligatoire en Allemagne reçoivent l'allocation prévue à l'article 249 a du SGB V, alors que les bénéficiaires d'une telle pension qui résident dans un autre État membre et qui, à ce titre, sont assujettis à l'assurance maladie obligatoire dans ce dernier État ne peuvent pas prétendre à cette prestation. M. Movrin a indiqué être obligé de s'affilier aux Pays-Bas au régime légal d'assurance maladie et ne disposer d'aucune possibilité de contracter une assurance maladie ouvrant droit à une allocation en Allemagne. Les lois allemandes qui s'opposent à la perception de l'allocation sollicitée par M. Movrin comporteraient également une discrimination déguisée au sens de l'article 6, premier alinéa, du traité CE (devenu, après modification, article 12, premier alinéa, CE), dans la mesure où elles régissent une situation qui désavantage le plus souvent les étrangers. Ces lois constitueraient en outre une violation du principe de la libre circulation des travailleurs au sens de l'article 48 du traité CE (devenu, après modification, article 39 CE).

22 Par décision du 9 janvier 1997, la LVA a refusé de verser l'allocation d'assurance maladie prévue à l'article 106 du SGB VI. Selon cette décision, M. Movrin, en tant que titulaire à la fois d'une pension allemande et d'une pension néerlandaise, serait soumis, conformément à l'article 27 du règlement n_ 1408/71, à l'assurance maladie obligatoire au titre de la législation néerlandaise. Autrement dit, la KVdR ne serait pas applicable, de sorte qu'aucune allocation au sens de l'article 106 du SGB VI ne pourrait être octroyée. L'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71 serait inapplicable en l'espèce, au motif que M. Movrin ne disposerait d'aucun droit à des prestations en espèces de maladie au titre du régime légal allemand d'assurance pension. De même, le principe de l'égalité de traitement prévu à l'article 3, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71 ne viendrait pas au soutien de la thèse de l'intéressé. En effet, un ressortissant allemand non assujetti à l'assurance maladie obligatoire des pensionnés n'aurait pas non plus droit à une allocation destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie.

23 M. Movrin a formé une réclamation contre cette décision en faisant valoir, à titre complémentaire, que l'article 27 du règlement n_ 1408/71 ne s'opposait aucunement à son droit. Cet article ne régirait en effet, selon lui, que les cas de perception de prestations d'assurance maladie. Or il s'agirait, en l'espèce, d'une allocation qui, conformément à l'article 1er, sous t), du règlement n_ 1408/71, constituerait une pension et donc un élément de la pension de vieillesse allemande. Cela résulterait également de l'article 23, paragraphe 1, point 1, sous e), du SGB I, en vertu duquel les allocations destinées à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie constituent des prestations du régime légal d'assurance pension. M. Movrin en déduit qu'il peut invoquer le bénéfice de l'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71.

24 Par décision du 26 juin 1997, la commission des réclamations de la LVA a rejeté la réclamation de M. Movrin pour les mêmes motifs que ceux figurant dans la décision de la LVA du 9 janvier 1997. Elle a ajouté que l'article 249 a du SGB V se bornait à déterminer qui devait supporter les cotisations à l'assurance maladie afférentes à une pension soumise, en vertu de l'article 228 du SGB V, au paiement de telles cotisations. Or, pour les titulaires de plusieurs pensions, tel M. Movrin, il n'y aurait pas, conformément à l'article 27 du règlement n_ 1408/71, d'assurance obligatoire allemande dans le cadre de la KVdR. Dans le cas de M. Movrin, l'obligation de s'assurer contre la maladie serait au contraire exclusivement régie par la législation néerlandaise.

25 Le 1er août 1997, M. Movrin a introduit un recours contre la décision de la commission des réclamations de la LVA devant le Sozialgericht Münster, en reprenant les mêmes arguments. Il a fait valoir que son analyse était partagée par la Commission qui, dans la lettre d'audition du 13 novembre 1991 dans la procédure SG(91)D/21325-A/91/0807 contre la République fédérale d'Allemagne, s'était élevée contre le fait que la Bundesversicherungsanstalt für Angestellte n'accordait pas d'allocation destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie aux pensionnés qui avaient contracté une assurance maladie auprès d'une assurance sise à l'étranger. Selon cette lettre, une telle allocation constituerait une pension au sens des articles 1er, sous t), et 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71.

26 Par décision du 21 octobre 1997, le Sozialgericht Münster a rejeté le recours de M. Movrin.

27 Celui-ci a interjeté appel le 25 novembre 1997 devant le Landessozialgericht Nordrhein-Westfalen. Devant cette juridiction, il a répété que, contrairement à la thèse de la LVA, l'allocation sollicitée ne constituait pas une prestation d'assurance maladie au sens de l'article 27 du règlement n_ 1408/71, mais une pension au sens de l'article 1er, sous t), du même règlement, de sorte qu'il convenait d'appliquer l'article 10 de ce règlement. Il a fait valoir que la même analyse effectuée par la Commission avait persuadé le législateur allemand de modifier le droit applicable de manière à permettre également aux bénéficiaires d'une pension allemande qui se sont assurés auprès d'une compagnie ayant son siège à l'étranger de percevoir une allocation destinée à concourir au règlement de leurs cotisations d'assurance maladie. Selon M. Movrin, il ne saurait en aller différemment pour les bénéficiaires d'une pension allemande qui - comme lui - résident dans un autre État membre et y sont assurés contre la maladie. C'est en ce sens que la Cour aurait jugé, dans son arrêt du 26 mai 1976, Aulich (103/75, Rec. p. 697), que le bénéficiaire d'une pension allemande résidant aux Pays-Bas avait droit à une contribution à la cotisation à son assurance maladie volontaire contractée selon le droit néerlandais.

28 M. Movrin a soutenu qu'il y aurait lieu, le cas échéant, de saisir la Cour d'une demande préjudicielle portant sur la question de savoir si l'allocation destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie constitue une pension au sens de l'article 10 du règlement n_ 1408/71.

29 La LVA, pour sa part, a relevé que, dans un arrêt du 27 avril 1977, le Bundessozialgericht avait jugé qu'une allocation allemande destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie était exclue en cas d'application d'un régime légal étranger d'assurance maladie obligatoire. Selon la LVA, l'arrêt Aulich, précité, ne serait pas pertinent en l'espèce parce que M. Movrin n'est pas affilié à titre volontaire mais à titre obligatoire au régime néerlandais d'assurance maladie. Elle souligne que l'article 106, paragraphe 1, deuxième phrase, du SGB VI exclut le paiement d'une allocation d'assurance maladie pour les périodes durant lesquelles le bénéficiaire de la pension est en même temps assujetti à une assurance légale obligatoire dans le cadre de l'assurance maladie.

30 Par arrêt du 27 juillet 1998, le Landessozialgericht Nordrhein-Westfalen a annulé la décision attaquée et renvoyé l'affaire devant le Sozialgericht Münster, qui a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question suivante:

«En refusant au demandeur, auquel elle verse une pension de vieillesse, le bénéfice d'une allocation destinée à concourir au règlement des cotisations afférentes à son assurance maladie néerlandaise, la défenderesse agit-elle en violation du droit communautaire?»

Sur la question préjudicielle

31 Par cette question, la juridiction de renvoi cherche en substance à savoir si les articles 1er, sous t), et 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71 doivent être interprétés en ce sens qu'une allocation prévue par la réglementation d'un État membre et destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie, telle que celle en cause au principal, constitue une prestation en espèces de vieillesse, au sens des dispositions précitées, à laquelle le bénéficiaire d'une pension de vieillesse due au titre de ladite réglementation peut prétendre, même s'il réside dans un autre État membre dans lequel il est soumis à l'assurance maladie obligatoire.

32 Il convient de rappeler que, conformément à l'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71, les prestations en espèces de vieillesse acquises au titre de la législation d'un ou de plusieurs États membres ne peuvent subir aucune réduction, ni modification, ni suspension, ni suppression, ni confiscation du fait que le bénéficiaire réside sur le territoire d'un État membre autre que celui où se trouve l'institution débitrice.

33 Cette disposition implique que ni la naissance ni le maintien du droit aux prestations, rentes et allocations visées à cette disposition ne peuvent être refusés pour la seule raison que l'intéressé ne réside pas sur le territoire de l'État membre où se trouve l'institution débitrice (arrêt du 24 février 1987, Giletti e.a., 379/85 à 381/85 et 93/86, Rec. p. 955, point 17).

34 Par ailleurs, selon l'article 1er, sous t), du règlement n_ 1408/71, les termes «prestations», «pensions» et «rentes» désignent, aux fins de l'application de ce règlement, «toutes prestations, pensions et rentes, y compris tous les éléments à charge des fonds publics, les majorations de revalorisation ou allocations supplémentaires, sous réserve des dispositions du titre III, ainsi que les prestations en capital qui peuvent être substituées aux pensions ou rentes et les versements effectués à titre de remboursement de cotisations».

35 La LVA part de la prémisse que l'allocation en cause au principal constitue une prestation de maladie. Or, dans la mesure où, conformément à l'article 27 du règlement n_ 1408/71, la législation de l'État membre de résidence, en l'occurrence le royaume des Pays-Bas, serait applicable en matière de prestations de maladie, le demandeur au principal ne saurait se prévaloir du régime allemand d'assurance maladie des pensionnés. En l'absence d'une prestation acquise au titre du régime légal d'assurance pension allemand, l'article 10 du règlement n_ 1408/71 ne saurait pas non plus être utilement invoqué.

36 Selon le gouvernement allemand, l'allocation en cause au principal n'est pas à considérer comme une «prestation» au sens de l'article 1er, sous t), du règlement n_ 1408/71, lorsque, comme en l'occurrence, l'intéressé relève d'un régime obligatoire d'assurance maladie. En effet, dans un tel cas, l'allocation allemande n'est pas versée au titulaire de la pension résidant en Allemagne, mais directement au régime d'assurance maladie. L'article 10 du règlement n_ 1408/71 ne saurait dès lors trouver application.

37 En vue de répondre à la question préjudicielle, il convient de vérifier si l'allocation litigieuse constitue une «prestation en espèces de vieillesse» au sens de l'article 10 du règlement n_ 1408/71.

38 Selon la jurisprudence de la Cour, la réponse à la question de savoir si une prestation entre dans le champ d'application du règlement n_ 1408/71 dépend essentiellement des éléments constitutifs de ladite prestation, et notamment de ses finalités et conditions d'octroi (voir, notamment, arrêt du 3 juin 1992, Paletta, C-45/90, Rec. p. I-3423, point 16).

39 Or, ainsi que M. Movrin et la Commission l'ont relevé à juste titre, le lien nécessaire entre l'allocation en cause au principal et la pension de vieillesse ainsi que la finalité correspondante résultent directement de la législation allemande.

40 À cet égard, il y a lieu de relever, notamment, que le bénéfice de l'allocation litigieuse suppose l'existence d'un droit à pension, que cette allocation est accordée par les institutions de l'assurance pension, que son montant est calculé en fonction du niveau des cotisations versées à l'assurance maladie, dont le montant est lui-même fixé sur la base de la pension perçue, et qu'elle vise à compléter les prestations de vieillesse de manière à contribuer au paiement des cotisations d'assurance maladie en vue d'alléger la charge que représentent ces dernières pour le titulaire de la pension.

41 Contrairement à ce qu'affirme la LVA, l'allocation litigieuse ne saurait être qualifiée de prestation de maladie au sens du règlement n_ 1408/71. Ainsi que M. Movrin et la Commission l'ont relevé à juste titre, ladite allocation n'est pas servie en cas de maladie, à savoir après la survenance du risque assuré, mais son versement conditionne l'existence même d'une telle prestation. Or, une contribution qui participe à la cotisation à l'assurance maladie ne peut être une prestation de cette même assurance (voir arrêt Aulich, précité, point 7).

42 En outre, l'argumentation défendue par le gouvernement allemand, selon laquelle les sommes payées par l'assurance pension à l'assurance maladie ne constituent pas une «prestation» au sens de l'article 1er, sous t), du règlement n_ 1408/71, dans la mesure où, en cas d'assurance maladie obligatoire, l'assurance pension verse sa quote-part de cotisation non pas au bénéficiaire de la pension, mais directement à l'organisme d'assurance maladie (article 255 du SGB V), doit également être rejetée.

43 Il convient de relever à cet égard que l'article 1er, sous t), du règlement n_ 1408/71 vise les compléments de pensions ou de rentes et envisage expressément le cas des «versements effectués à titre de remboursement de cotisations». Ainsi que le souligne à juste titre la Commission, la circonstance que de tels versements soient effectués directement en faveur de l'organisme d'assurance maladie plutôt qu'en faveur du titulaire de la pension affilié à titre obligatoire au régime d'assurance maladie en question ne change rien à la constatation déterminante que ces versements sont effectués au profit du titulaire de la pension et qu'ils ont pour effet de majorer le montant de sa pension en vue de compenser la charge que constitue pour lui le paiement de cotisations. Par ailleurs, comme M. Movrin l'a justement relevé, admettre l'argumentation du gouvernement allemand permettrait de tenir en échec l'application du principe de l'exportabilité des prestations inscrit à l'article 10 du règlement n_ 1408/71 du seul fait que les prestations ne sont pas versées à leur titulaire, mais le sont directement au régime d'assurance maladie au titre duquel sont dues les cotisations qu'elles servent à payer.

44 Il résulte de ce qui précède qu'une allocation telle que celle en cause au principal, en ce qu'elle se concrétise par une augmentation du niveau de la pension (voir, notamment, arrêt Giletti e.a., précité, point 14), constitue une prestation en espèces de vieillesse au sens de l'article 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71, lequel en garantit l'exportabilité en l'absence de modalité particulière au sens de l'annexe VI du même règlement de nature à conduire à l'exclusion de l'applicabilité de cette disposition.

45 Par conséquent, une personne se trouvant dans la situation de M. Movrin ne saurait se voir retirer le droit au complément de pension litigieux du seul fait qu'elle ne réside plus sur le territoire de l'État membre débiteur de ladite prestation.

46 Le gouvernement allemand objecte que le royaume des Pays-Bas prend à tort en considération le montant de la pension due en vertu de la législation d'autres États membres aux fins du financement de l'assurance maladie néerlandaise. Ainsi, conformément à la Ziekenfondswet (loi néerlandaise relative aux caisses de maladie), au cours de l'année de l'introduction de sa demande, soit en 1996, le demandeur au principal aurait été tenu de verser à l'assurance maladie néerlandaise - outre une cotisation de base de 7,4 % de sa pension néerlandaise - un montant supplémentaire égal à 5,4 % de tous les autres revenus, y compris la pension légale allemande.

47 Le gouvernement allemand considère qu'une telle prise en considération de pensions dues en vertu de la législation d'autres États membres en vue du financement de l'assurance maladie est incompatible avec les dispositions de l'article 33 du règlement n_ 1408/71. Or, une mesure illégale de cette nature ne saurait servir de fondement juridique à l'obligation pour l'organisme allemand qui sert la pension soumise à cotisation de verser une compensation sous la forme d'une allocation destinée à concourir au règlement des cotisations.

48 À cet égard, il suffit de relever que, comme la Commission l'a observé à juste titre, à supposer même que la législation néerlandaise méconnaisse l'article 33 du règlement n_ 1408/71, pareille circonstance ne saurait en aucun cas remettre en question le principe de l'exportabilité des prestations en espèces de vieillesse dues en vertu de la législation d'un État membre, qui est garanti par l'article 10 de ce règlement.

49 Le gouvernement allemand fait encore valoir que l'allocation en cause au principal est en tout cas exclue dans un cas comme celui de M. Movrin, dans lequel le montant des cotisations que ce dernier doit verser sur sa pension allemande à l'assurance maladie néerlandaise (5,4 %) est inférieur à celui qu'il aurait dû verser sur sa pension allemande (environ 7 %) s'il avait résidé en Allemagne et avait été affilié à titre obligatoire à la KVdR. L'octroi de cette allocation aboutirait à privilégier l'intéressé d'une manière injustifiée par rapport à un retraité relevant de la KVdR, ce qui serait inacceptable.

50 M. Movrin réplique que le gouvernement allemand ne tient pas compte des cotisations d'un montant de 7,35 %, calculées elles aussi sur les pensions néerlandaise et allemande, qu'il doit verser au titre de la loi néerlandaise générale sur les frais exceptionnels de maladie. En fin de compte, il paierait au titre de son assurance maladie aux Pays-Bas bien davantage que le taux allemand de 7 %.

51 À supposer même que, comme le soutient le gouvernement allemand, l'intéressé puisse se trouver dans une situation avantageuse par rapport à un retraité ayant toujours résidé en Allemagne, pareille conséquence découlerait, non de l'interprétation du droit communautaire, mais du système actuellement en vigueur qui, faute d'un régime commun de sécurité sociale, repose sur une simple coordination de législations nationales non harmonisées (voir, notamment, arrêts du 10 novembre 1971, Keller, 27/71, Rec. p. 885, point 13, et du 13 octobre 1977, Mura, 22/77, Rec. p. 1699, point 10).

52 Dans ces conditions, il convient de répondre à la question que les articles 1er, sous t), et 10, paragraphe 1, du règlement n_ 1408/71 doivent être interprétés en ce sens qu'une allocation prévue par la réglementation d'un État membre et destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie, telle que celle en cause au principal, constitue une prestation en espèces de vieillesse, au sens de ces dispositions, à laquelle le bénéficiaire d'une pension de vieillesse due au titre de ladite réglementation peut prétendre, même s'il réside dans un autre État membre dans lequel il est soumis à l'assurance maladie obligatoire.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

53 Les frais exposés par le gouvernement allemand et par la Commission, qui ont soumis des observations à la Cour, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement. La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction nationale, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

(sixième chambre),

statuant sur la question à elle soumise par le Sozialgericht Münster, par ordonnance du 26 janvier 1999, dit pour droit:

Les articles 1er, sous t), et 10, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n_ 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, doivent être interprétés en ce sens qu'une allocation prévue par la réglementation d'un État membre et destinée à concourir au règlement des cotisations d'assurance maladie, telle que celle en cause au principal, constitue une prestation en espèces de vieillesse, au sens de ces dispositions, à laquelle le bénéficiaire d'une pension de vieillesse due au titre de ladite réglementation peut prétendre, même s'il réside dans un autre État membre dans lequel il est soumis à l'assurance maladie obligatoire.