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ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

18 janvier 2017 ( 1 )

«Renvoi préjudiciel — Fiscalité — Taxe sur la valeur ajoutée — Directive 2006/112/CE — Régime particulier d’imposition de la marge bénéficiaire — Notion de “biens d’occasion” — Ventes de pièces détachées de véhicules hors d’usage»

Dans l’affaire C-471/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Vestre Landsret (cour d’appel de la région Ouest, Danemark), par décision du 2 septembre 2015, parvenue à la Cour le 7 septembre 2015, dans la procédure

Sjelle Autogenbrug I/S

contre

Skatteministeriet,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, MM. M. Vilaras (rapporteur), J. Malenovský, M. Safjan et D. Šváby, juges,

avocat général : M. Y. Bot,

greffier : Mme L. Hewlett, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 septembre 2016,

considérant les observations présentées :

pour Sjelle Autogenbrug I/S, par Me C. Bachmann, advokat,

pour le gouvernement danois, par M. C. Thorning, en qualité d’agent, assisté de Me D. Auken, advokat,

pour le gouvernement hellénique, par Mmes E. Tsaousi et K. Nasopoulou, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, initialement par Mmes L. Lozano Palacios et M. Clausen, puis par Mmes L. Lozano Palacios, L. Grønfeldt et M. Clausen, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 22 septembre 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Sjelle Autogenbrug I/S au Skatteministeriet (ministère des Impôts et Accises, Danemark), au sujet de l’applicabilité du régime d’imposition de la marge bénéficiaire à la vente de pièces provenant de véhicules automobiles hors d’usage destinées à être vendues comme pièces de rechange.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2006/112

3

Le considérant 51 de la directive 2006/112 énonce :

« Il convient d’arrêter un régime communautaire de taxation applicable dans le domaine des biens d’occasion, des objets d’art, d’antiquité et de collection, visant à éviter les doubles impositions et les distorsions de concurrence entre assujettis. »

4

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive :

« Le principe du système commun de [la taxe sur la valeur ajoutée (“TVA”)] est d’appliquer aux biens et aux services un impôt général sur la consommation exactement proportionnel au prix des biens et des services, quel que soit le nombre des opérations intervenues dans le processus de production et de distribution antérieur au stade d’imposition.

À chaque opération, la TVA, calculée sur le prix du bien ou du service au taux applicable à ce bien ou à ce service, est exigible déduction faite du montant de la taxe qui a grevé directement le coût des divers éléments constitutifs du prix.

[...] »

5

Le titre XII de la directive 2006/112, intitulé « Régimes particuliers », comporte un chapitre 4, intitulé « Régimes particuliers applicables dans le domaine des biens d’occasion, des objets d’art, de collection ou d’antiquité », constitué des articles 311 à 343 de cette directive.

6

Aux termes de l’article 311, paragraphe 1, points 1 et 5, de ladite directive :

« Aux fins du présent chapitre, et sans préjudice d’autres dispositions communautaires, sont considérés comme :

1)

“biens d’occasion”, les biens meubles corporels susceptibles de remploi, en l’état ou après réparation, autres que des objets d’art, de collection ou d’antiquité et autres que des métaux précieux ou des pierres précieuses tels que définis par les États membres ;

[...]

5)

“assujetti-revendeur”, tout assujetti qui, dans le cadre de son activité économique, achète ou affecte aux besoins de son entreprise ou importe, en vue de leur revente, des biens d’occasion, des objets d’art, de collection ou d’antiquité, que cet assujetti agisse pour son compte ou pour le compte d’autrui en vertu d’un contrat de commission à l’achat ou à la vente ».

7

La section 2 du chapitre 4 figurant sous le titre XII de la directive 2006/112 a pour titre « Régime particulier des assujettis-revendeurs ». Elle contient, notamment, une sous-section 1, intitulée « Régime de la marge bénéficiaire », sous laquelle figurent les articles 312 à 325 de cette directive.

8

L’article 312 de ladite directive dispose :

« Aux fins de la présente sous-section, on entend par :

1)

“prix de vente”, tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par l’assujetti-revendeur de la part de l’acquéreur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées à l’opération, les impôts, droits, prélèvements et taxes, les frais accessoires tels que les frais de commission, d’emballage, de transport et d’assurance demandés par l’assujetti-revendeur à l’acquéreur mais à l’exclusion des montants visés à l’article 79 ;

2)

“prix d’achat”, tout ce qui constitue la contrepartie définie au point 1), obtenue ou à obtenir de la part de l’assujetti-revendeur par son fournisseur. »

9

L’article 313, paragraphe 1, de la directive 2006/112 énonce :

« Les États membres appliquent aux livraisons de biens d’occasion, d’objets d’art, de collection ou d’antiquité effectuées par des assujettis-revendeurs un régime particulier d’imposition de la marge bénéficiaire réalisée par l’assujetti-revendeur, conformément aux dispositions de la présente sous-section. »

10

Aux termes de l’article 314 de cette directive :

« Le régime de la marge bénéficiaire s’applique aux livraisons de biens d’occasion, d’objets d’art, de collection ou d’antiquité, effectuées par un assujetti-revendeur, lorsque ces biens lui sont livrés dans la Communauté par une des personnes suivantes :

a)

une personne non assujettie ;

[...] »

11

L’article 315 de ladite directive dispose :

« La base d’imposition des livraisons de biens visées à l’article 314 est constituée par la marge bénéficiaire réalisée par l’assujetti-revendeur, diminuée du montant de la TVA afférente à la marge bénéficiaire elle-même.

La marge bénéficiaire de l’assujetti-revendeur est égale à la différence entre le prix de vente demandé par l’assujetti-revendeur pour le bien et le prix d’achat. »

12

L’article 318 de la directive 2006/112 prévoit:

« 1.   Afin de simplifier la perception de la taxe, et après consultation du comité de la TVA, les États membres peuvent prévoir, pour certaines opérations ou pour certaines catégories d’assujettis-revendeurs, que la base d’imposition des livraisons de biens soumises au régime de la marge bénéficiaire est déterminée pour chaque période imposable au titre de laquelle l’assujetti-revendeur doit déposer la déclaration de TVA visée à l’article 250.

Dans le cas visé au premier alinéa, la base d’imposition pour les livraisons de biens auxquelles un même taux de TVA est appliqué, est constituée par la marge bénéficiaire globale réalisée par l’assujetti-revendeur diminuée du montant de la TVA afférente à cette même marge bénéficiaire.

2.   La marge bénéficiaire globale est égale à la différence entre les deux montants suivants :

a)

le montant total des livraisons de biens soumises au régime de la marge bénéficiaire et qui ont été effectuées par l’assujetti-revendeur au cours de la période imposable visée par la déclaration, c’est-à-dire le montant total des prix de vente ;

b)

le montant total des achats de biens visés à l’article 314 et effectués, au cours de la période imposable visée par la déclaration, par l’assujetti-revendeur, c’est-à-dire le montant total des prix d’achat.

3.   Les États membres prennent les mesures nécessaires en vue d’assurer que les assujettis visés au paragraphe 1 ne bénéficient pas d’avantages injustifiés ou ne subissent pas de préjudices injustifiés. »

La directive 2000/53/CE

13

Le considérant 5 de la directive 2000/53/CE du Parlement européen et du Conseil, du 18 septembre 2000, relative aux véhicules hors d’usage (JO 2000, L 269, p. 34), énonce qu’il existe un principe fondamental selon lequel les déchets devraient être réutilisés et valorisés, et la préférence devrait être donnée à la réutilisation et au recyclage. Le considérant 14 de cette directive reconnaît la nécessité d’encourager le développement de marchés pour les matériaux recyclés.

14

L’article 3 de la directive 2000/53, intitulé « Champ d’application », dispose, à son paragraphe 1 :

« La présente directive s’applique aux véhicules et aux véhicules hors d’usage, y compris leurs composants et matériaux. Cette disposition s’applique, sans préjudice à l’article 5, paragraphe 4, troisième alinéa, indépendamment de la manière dont le véhicule a été entretenu ou réparé pendant son utilisation et indépendamment de la question de savoir si le véhicule est équipé de composants fournis par le producteur ou bien d’autres composants dont le montage en tant que pièces de rechange ou équipements supplémentaires répond aux dispositions communautaires ou nationales applicables en la matière. »

Le droit danois

15

Sous le chapitre 17, intitulé « Dispositions particulières pour les biens d’occasion, œuvres d’art, objets de collection et antiquités », de la lov om merværdiafgift nr. 106 (loi no 106 relative à la taxe sur la valeur ajoutée), du 23 janvier 2013, dans sa version applicable à la date des faits au principal (ci-après la « loi relative à la TVA »), l’article 69, paragraphe 1, point 1, et paragraphe 3, prévoit :

« 1.   Les entreprises qui acquièrent entre autres, dans le but de les revendre, des biens d’occasion, des œuvres d’art, des objets de collection et des antiquités, peuvent à la revente payer la taxe sur les biens d’occasion en question en vertu des dispositions du présent chapitre. L’application de ces règles, notamment aux biens d’occasion, est soumise à la condition préalable que ces biens soient livrés à l’entreprise à partir du Danemark ou d’un autre pays de l’Union européenne par :

1)

une personne non assujettie,

[...]

3.   Par biens d’occasion, on désigne les biens meubles corporels qui peuvent être réutilisés tels quels ou après réparation, autres que les œuvres d’art, objets de collection, les antiquités et les pierres et métaux précieux. Un moyen de transport livré à destination ou depuis d’autres pays de l’Union européenne, est considéré comme d’occasion s’il ne relève pas de la définition donnée à l’article 11, paragraphe 6. »

16

Selon les travaux préparatoires de la loi sur la TVA de 1994 (Folketingstidende 1993-1994, Annexe A, colonne 4368), qui a introduit des règles sur la TVA des biens d’occasion, « [l]’objectif des règles proposées est d’éviter le paiement de l’intégralité de la taxe pour le même bien deux fois ou plus. C’est par exemple le cas lorsque des négociants achètent à des particuliers des biens d’occasion pour les revendre ».

17

Il ressort de ces travaux préparatoires que la notion de « biens d’occasion », visée à l’article 69, paragraphe 3, de la loi relative à la TVA, désigne « les biens meubles corporels qui peuvent être réutilisés tels quels ou après réparation. Il en résulte que le bien meuble corporel doit conserver son identité ».

18

Dans un avis d’orientation du 10 février 2006 sur la TVA applicable aux voitures mises au rebut, l’administration fiscale a indiqué que les règles de la TVA sur les biens d’occasion ne s’appliquent pas à la revente de pièces détachées par un démolisseur de voitures, puisque la voiture, transformée en pièces détachées, change alors de caractère.

Le litige au principal et la question préjudicielle

19

Sjelle Autogenbrug est une entreprise de recyclage de voitures dont l’activité principale est la commercialisation de pièces usagées automobiles provenant de véhicules hors d’usage.

20

L’activité de Sjelle Autogenbrug inclut, en outre, la dépollution et le traitement des déchets issus de ces véhicules, condition préalable pour avoir le droit de procéder au prélèvement des pièces de rechange. Enfin, une partie modeste du chiffre d’affaires global de l’entreprise résulte de la vente des débris métalliques (ferraille) qui subsistent après le traitement et le prélèvement des pièces automobiles.

21

L’achat par Sjelle Autogenbrug de véhicules hors d’usage s’effectue auprès des particuliers et des compagnies d’assurances. Ni les particuliers ni les compagnies d’assurances ne déclarent la TVA sur les ventes réalisées. La juridiction de renvoi a indiqué, dans sa décision, que la question qu’elle pose à la Cour ne concerne que la qualification des pièces usagées provenant de véhicules achetés par Sjelle Autogenbrug à des particuliers.

22

La mise au rebut d’un véhicule hors d’usage donne droit à une prime à la casse, versée par le ministère de l’Environnement au dernier propriétaire du véhicule inscrit dans le fichier national des véhicules. Ce régime vise à inciter les propriétaires à veiller à une mise au rebut du véhicule respectueuse de l’environnement. À partir de l’année 2014, il incombe aux propriétaires de ces véhicules, et non plus à Sjelle Autogenbrug, de se charger de la perception de la prime à la casse.

23

La juridiction de renvoi indique qu’il n’y a pas d’éléments disponibles sur la composition du prix d’achat des véhicules et, notamment, sur la détermination et l’intégration dans le prix de vente de la valeur des pièces automobiles, des débris métalliques ainsi que de la prime à la casse prévue pour la dépollution et le traitement des déchets des véhicules.

24

La juridiction de renvoi expose que Sjelle Autogenbrug déclare la TVA selon les règles générales. Le 15 juillet 2010, elle a sollicité des autorités fiscales danoises l’adoption d’un rescrit fiscal sur l’applicabilité à son activité de revente de pièces automobiles usagées du régime de TVA sur les biens d’occasion prévu au chapitre 17 de la loi relative à la TVA.

25

Selon le rescrit fiscal que l’administration lui a délivré le 6 août 2010, Sjelle Autogenbrug n’a pas le droit de se prévaloir du régime d’imposition sur la marge bénéficiaire des ventes de biens d’occasion, au motif que les pièces automobiles en question ne relèvent pas de la notion de « biens d’occasion » au sens de la législation applicable.

26

Le Landsskatteretten (tribunal fiscal, Danemark) a confirmé ce rescrit par un jugement du 12 décembre 2011. La requérante au principal a interjeté appel de ce dernier devant la juridiction de renvoi.

27

Dans ces conditions, le Vestre Landsret (cour d’appel de la région Ouest, Danemark) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Les pièces provenant de véhicules hors d’usage et prélevées dans le but de les revendre comme pièces de rechange par une entreprise de recyclage automobile, enregistrée aux fins de la TVA, peuvent-elles, dans les circonstances comme celles de la présente affaire, être considérées comme des biens d’occasion au sens de l’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive [2006/112] ? »

Sur la question préjudicielle

28

Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que des pièces usagées, qui proviennent de véhicules automobiles hors d’usage acquis par une entreprise de recyclage automobile auprès d’un particulier et qui sont destinées à être vendues comme pièces de rechange, constituent des « biens d’occasion », au sens de cette disposition, avec la conséquence que les livraisons de telles pièces, effectuées par un assujetti-revendeur, sont soumises à l’application du régime de la marge bénéficiaire.

29

À cet égard, il convient de rappeler que, pour déterminer la portée d’une disposition du droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte à la fois des termes, de l’objectif et du contexte de celle-ci (arrêt du 3 mars 2011, Auto Nikolovi,C-203/10, EU:C:2011:118, point 41 et jurisprudence citée).

30

En l’occurrence, aux termes de l’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive 2006/112, constituent des « biens d’occasion » les « biens meubles corporels susceptibles de remploi, en l’état ou après réparation ».

31

Il y a lieu de constater qu’il ne ressort pas de cette disposition que la notion de « biens d’occasion », au sens de celle-ci, exclut les biens meubles corporels susceptibles de remploi, en l’état ou après réparation, provenant d’un autre bien dans lequel ils étaient incorporés en tant que parties constitutives. En effet, la circonstance qu’un bien usagé constitutif d’un autre bien soit séparé de ce dernier ne remet pas en cause la qualification du bien prélevé de « bien d’occasion », pour autant qu’il puisse être réutilisé « en l’état ou après réparation ».

32

Par ailleurs, la qualification de « bien d’occasion » requiert uniquement que le bien usagé ait conservé les fonctionnalités qu’il possédait à l’état neuf, et qu’il puisse, de ce fait, être réutilisé tel quel ou après réparation.

33

Or, tel est le cas des pièces automobiles détachées d’un véhicule automobile hors d’usage, dans la mesure où, même séparées de ce véhicule, elles conservent les fonctionnalités qu’elles possédaient à l’état neuf et peuvent ainsi être réutilisées aux mêmes fins.

34

Cette interprétation est, du reste, conforme au principe fondamental énoncé au considérant 5 de la directive 2000/53, selon lequel il y a lieu de réutiliser et de valoriser les déchets automobiles, parmi lesquels figurent les composants et les matériaux des véhicules hors d’usage.

35

L’argumentation du gouvernement danois, selon laquelle la qualification de « bien d’occasion », au sens de l’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive 2006/112, suppose une identité entre le bien acheté et le bien vendu, ce qui ne serait pas le cas dans l’hypothèse de l’achat d’un véhicule automobile complet et de la revente des pièces détachées prélevées sur ce véhicule, ne saurait conduire à remettre en cause une telle interprétation. Ce gouvernement estime que les pièces détachées d’un véhicule usagé ont été produites lors du traitement des déchets du véhicule. Elles n’auraient, de ce fait, pas conservé leur identité entre le moment où elles ont été acquises par l’entreprise en tant que parties d’un véhicule hors d’usage et le moment où elles ont été vendues en tant que pièces détachées.

36

Il convient cependant de constater qu’un véhicule automobile est composé d’un ensemble de pièces qui ont été assemblées et qui peuvent être détachées et revendues, en l’état ou après réparation.

37

Dans ces conditions, les pièces provenant de véhicules automobiles hors d’usage doivent être regardées comme constituant des « biens d’occasion », au sens de l’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive 2006/112, avec la conséquence que les livraisons de telles pièces effectuées par des assujettis-revendeurs sont soumises à l’application du régime de la marge bénéficiaire, conformément à l’article 313, paragraphe 1, de cette directive.

38

À cet égard, s’agissant du régime de la marge bénéficiaire, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 315, second alinéa, de la directive 2006/112, la marge bénéficiaire de l’assujetti-revendeur est égale à la différence entre le prix de vente demandé par l’assujetti-revendeur pour le bien et le prix d’achat.

39

La non-application de ce régime aux pièces de rechange, prélevées sur des véhicules automobiles hors d’usage achetés à des particuliers serait contraire à l’objectif du régime particulier de la marge bénéficiaire qui vise, ainsi que cela ressort du considérant 51 de la directive 2006/112, à éviter les doubles impositions et les distorsions de concurrence entre assujettis dans le domaine des biens d’occasion (voir, en ce sens, arrêts du 1er avril 2004, Stenholmen,C-320/02, EU:C:2004:213, point 25 ; du 8 décembre 2005, Jyske Finans,C-280/04, EU:C:2005:753, point 37, ainsi que du 3 mars 2011, Auto Nikolovi,C-203/10, EU:C:2011:118, point 47).

40

En effet, l’assujettissement à la TVA des opérations de livraison de telles pièces de rechange effectuées par un assujetti-revendeur entraînerait une double imposition, dans la mesure où, d’une part, le prix de vente desdites pièces tient nécessairement déjà compte de la TVA ayant été acquittée en amont lors de l’achat du véhicule par une personne relevant de l’article 314, sous a), de la directive 2006/112 et, d’autre part, ni cette personne ni l’assujetti-revendeur n’a été en mesure de déduire ce montant (voir arrêt du 3 mars 2011, Auto Nikolovi,C-203/10, EU:C:2011:118, point 48 et jurisprudence citée).

41

Certes, les gouvernements danois et grec font état d’éventuelles difficultés dans la détermination, conformément à l’article 315 de la directive 2006/112, de la base d’imposition de la marge bénéficiaire et, notamment, du prix d’achat de chacune des pièces détachées.

42

Toutefois, les éventuelles difficultés pratiques dans l’application du régime de la marge bénéficiaire ne sauraient justifier l’exclusion de certaines catégories d’assujettis-revendeurs de ce régime, la possibilité d’une telle exclusion n’étant prévue ni à l’article 313 ni à aucune autre des dispositions de la directive 2006/112.

43

Par ailleurs, la base d’imposition déterminée selon le régime de la marge bénéficiaire doit ressortir d’une comptabilité qui permette de vérifier que toutes les conditions d’application de ce régime sont remplies.

44

En outre, il convient de rappeler que, afin de simplifier la perception de la taxe et après consultation du comité de la TVA, les États membres peuvent prévoir, pour certaines opérations ou pour certaines catégories d’assujettis-revendeurs, que la base d’imposition des livraisons de biens soumises au régime de la marge bénéficiaire et auxquelles un même taux de TVA est appliqué est constituée par la marge bénéficiaire globale, telle que définie par l’article 318 de la directive 2006/112.

45

Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la juridiction de renvoi que l’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive 2006/112 doit être interprété en ce sens que des pièces usagées, qui proviennent de véhicules automobiles hors d’usage acquis par une entreprise de recyclage automobile auprès d’un particulier et qui sont destinées à être vendues comme pièces de rechange, constituent des « biens d’occasion », au sens de cette disposition, avec la conséquence que les livraisons de telles pièces, effectuées par un assujetti-revendeur, sont soumises à l’application du régime de la marge bénéficiaire.

Sur les dépens

46

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

 

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

 

L’article 311, paragraphe 1, point 1, de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, doit être interprété en ce sens que des pièces usagées, qui proviennent de véhicules automobiles hors d’usage acquis par une entreprise de recyclage automobile auprès d’un particulier et qui sont destinées à être vendues comme pièces de rechange, constituent des « biens d’occasion », au sens de cette disposition, avec la conséquence que les livraisons de telles pièces, effectuées par un assujetti-revendeur, sont soumises à l’application du régime de la marge bénéficiaire.

 

Signatures


( 1 ) Langue de procédure : le danois.