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ARRÊT DE LA COUR (huitième chambre)

8 décembre 2022 (*)

« Renvoi préjudiciel – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Article 42, sous a) – Article 197, paragraphe 1, sous c) – Article 226, point 11 bis – Article 141 – Exonération – Opération triangulaire – Désignation du destinataire final d’une livraison comme étant redevable de la TVA – Factures – Mention “Autoliquidation” – Caractère obligatoire – Omission de cette mention sur une facture – Rectification rétroactive de la facture »

Dans l’affaire C-247/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), par décision du 8 avril 2021, parvenue à la Cour le 20 avril 2021, dans la procédure visant

Luxury Trust Automobil GmbH

contre

Finanzamt Österreich,

LA COUR (huitième chambre),

composée de Mme K. Jürimäe (rapporteure), présidente de la troisième chambre, faisant fonction de président de la huitième chambre, MM. N. Piçarra et N. Jääskinen, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

–        pour Luxury Trust Automobil GmbH, par M. M. Huber, conseiller fiscal et expert-comptable, et M. S. Lacha, conseiller fiscal,

–        pour le gouvernement autrichien, par Mme M. Augustin, M. A. Posch et Mme J. Schmoll, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par MM. R. Pethke et V. Uher, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 14 juillet 2022,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 42, sous a), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1), telle que modifiée par la directive 2010/45/UE du Conseil, du 13 juillet 2010 (JO 2010, L 189, p. 1) (ci-après la « directive TVA »), lu en combinaison avec l’article 197, paragraphe 1, sous c), de cette directive, et de l’article 219 bis de ladite directive.

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Luxury Trust Automobil GmbH au Finanzamt Österreich (administration fiscale d’Autriche, ci-après l’« administration fiscale ») à propos de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) réclamée à cette société pour l’exercice fiscal afférent à l’année 2014.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

 La directive TVA

3        L’article 2, paragraphe 1, sous b), i), de la directive TVA énonce :

« Sont soumises à la TVA les opérations suivantes :

[...]

b)      les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre :

i)      par un assujetti agissant en tant que tel, ou par une personne morale non assujettie, lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel qui ne bénéficie pas de la franchise pour les petites entreprises prévue aux articles 282 à 292 et qui ne relève pas des dispositions prévues aux articles 33 et 36 ».

4        Le titre V de cette directive est intitulé « Lieu des opérations imposables ». Sous le chapitre 2 de ce titre, les articles 40 à 42 de ladite directive définissent le lieu d’une acquisition intracommunautaire de biens.

5        Aux termes de l’article 40 de la même directive, « [l]e lieu d’une acquisition intracommunautaire de biens est réputé se situer à l’endroit où les biens se trouvent au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport à destination de l’acquéreur ».

6        L’article 41 de la directive TVA précise :

« Sans préjudice des dispositions de l’article 40, le lieu d’une acquisition intracommunautaire de biens visée à l’article 2, paragraphe 1, point b) i), est réputé se situer sur le territoire de l’État membre qui a attribué le numéro d’identification TVA sous lequel l’acquéreur a effectué cette acquisition, dans la mesure où l’acquéreur n’établit pas que cette acquisition a été soumise à la TVA conformément à l’article 40.

Si, en application de l’article 40, l’acquisition est soumise à la TVA dans l’État membre d’arrivée de l’expédition ou du transport des biens après avoir été soumise à la taxe en application du premier alinéa, la base d’imposition est réduite à due concurrence dans l’État membre qui a attribué le numéro d’identification TVA sous lequel l’acquéreur a effectué cette acquisition. »

7        L’article 42 de cette directive est libellé comme suit :

« L’article 41, premier alinéa, ne s’applique pas et l’acquisition intracommunautaire de biens est réputée avoir été soumise à la TVA conformément à l’article 40, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a)      l’acquéreur établit avoir effectué cette acquisition pour les besoins d’une livraison subséquente, effectuée sur le territoire de l’État membre déterminé conformément à l’article 40, pour laquelle le destinataire a été désigné comme redevable de la taxe conformément à l’article 197 ;

b)      l’acquéreur a rempli les obligations relatives au dépôt de l’état récapitulatif prévues à l’article 265. »

8        Le titre IX de ladite directive est intitulé « Exonérations ». Le chapitre 4 de ce titre est consacré aux exonérations liées aux opérations intracommunautaires. La section 2 de ce chapitre vise les exonérations des acquisitions intracommunautaires de biens. Au sein de cette section, l’article 141 de la même directive dispose :

« Chaque État membre prend des mesures particulières afin de ne pas soumettre à la TVA les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées sur son territoire, en vertu de l’article 40, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a)      l’acquisition de biens est effectuée par un assujetti qui n’est pas établi dans cet État membre, mais identifié à la TVA dans un autre État membre ;

b)      l’acquisition de biens est effectuée pour les besoins d’une livraison subséquente de ces biens, effectuée dans ce même État membre par l’assujetti visé au point a) ;

c)      les biens ainsi acquis par l’assujetti visé au point a) sont directement expédiés ou transportés à partir d’un État membre autre que celui à l’intérieur duquel il est identifié à la TVA et à destination de la personne pour laquelle il effectue la livraison subséquente ;

d)      le destinataire de la livraison subséquente est un autre assujetti, ou une personne morale non assujettie, identifiés à la TVA dans ce même État membre ;

e)      le destinataire visé au point d) a été désigné, conformément à l’article 197, comme redevable de la taxe due au titre de la livraison effectuée par l’assujetti qui n’est pas établi dans l’État membre dans lequel la taxe est due. »

9        Au sein du titre XI de la directive TVA, intitulé « Obligations des assujettis et de certaines personnes non assujetties », l’article 197, paragraphe 1, de celle-ci prévoit :

« La TVA est due par le destinataire de la livraison de biens, lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a)      l’opération imposable est une livraison de biens effectuée dans les conditions prévues à l’article 141 ;

b)      le destinataire de cette livraison de biens est un autre assujetti, ou une personne morale non assujettie, identifiés à la TVA dans l’État membre dans lequel la livraison est effectuée ;

c)      la facture émise par l’assujetti non établi dans l’État membre du destinataire est établie conformément aux dispositions du chapitre 3, sections 3 à 5. »

10      L’article 219 bis de cette directive dispose :

« Sans préjudice des articles 244 à 248, les dispositions ci-après s’appliquent :

1)      la facturation est soumise aux règles applicables dans l’État membre dans lequel la livraison de biens ou la prestation de services est réputée être effectuée conformément aux dispositions du titre V ;

2)      par dérogation au point 1, la facturation est soumise aux règles applicables dans l’État membre dans lequel le fournisseur ou le prestataire a établi le siège de son activité économique ou dispose d’un établissement stable à partir duquel la livraison ou la prestation est effectuée, ou, en l’absence d’un tel siège ou d’un tel établissement stable, dans l’État membre dans lequel le fournisseur ou le prestataire a son domicile ou sa résidence habituelle, lorsque :

a)      le fournisseur n’est pas établi dans l’État membre dans lequel la livraison de biens ou de la prestation de services est réputée être effectuée conformément aux dispositions du titre V ou son établissement dans ledit État membre ne participe pas à la livraison ou prestation au sens de l’article 192 bis, et que le redevable de la TVA est le destinataire de la livraison de biens ou de la prestation de services.

Toutefois, lorsque l’acquéreur ou le preneur émet la facture (autofacturation), le paragraphe 1 s’applique ;

b)      la livraison de biens ou la prestation de services est réputée ne pas être effectuée dans la Communauté, conformément aux dispositions du titre V. »

11      Le contenu des factures est précisé à la section 4 du chapitre 3 du titre XI de ladite directive. Parmi les dispositions de cette section, l’article 226 de la même directive énonce :

« Sans préjudice des dispositions particulières prévues par la présente directive, seules les mentions suivantes doivent figurer obligatoirement, aux fins de la TVA, sur les factures émises en application des dispositions des articles 220 et 221 :

[...]

11 bis)      lorsque l’acquéreur ou le preneur est redevable de la TVA, la mention “Autoliquidation” ;

[...] »

 La directive 2010/45

12      Le considérant 7 de la directive 2010/45 est libellé comme suit :

« Il convient de modifier certaines exigences relatives aux informations devant figurer sur les factures afin de permettre un meilleur contrôle de la taxe, de garantir une plus grande uniformité de traitement entre les livraisons de biens ou les prestations de services transfrontalières et nationales et de contribuer à promouvoir la facturation électronique. »

 Le droit autrichien

13      L’article 3, paragraphe 8, de l’Umsatzsteuergesetz 1994 (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires de 1994), du 23 août 1994 (BGBl. 663/1994), dans sa version applicable pour l’année 2014 (BGBl. I, 112/2012) (ci-après l’« UStG 1994 »), intitulé « Lieu de l’acquisition intracommunautaire », est libellé comme suit :

« L’acquisition intracommunautaire est réputée avoir été effectuée sur le territoire de l’État membre où se trouve le bien à l’arrivée du transport ou de l’expédition. Lorsque l’acquéreur utilise, à l’égard du fournisseur, un numéro d’identification TVA qui lui a été délivré par un autre État membre, l’acquisition est réputée avoir été effectuée sur le territoire de cet État membre jusqu’à ce que l’acquéreur établisse que l’acquisition a été imposée par l’État membre visé dans la première phrase. Pour ce qui est de la preuve, l’article 16 s’applique mutatis mutandis. »

14      L’article 25 de l’UStG 1994, intitulé « Opération triangulaire », prévoit :

« Notion

Article 25 (1) Une opération triangulaire est réalisée lorsque trois entrepreneurs de trois États membres différents effectuent des opérations portant sur le même bien, que ce bien est directement transmis par le premier fournisseur au dernier acquéreur, et que les conditions énumérées au paragraphe 3 sont remplies. Il en va de même lorsque le dernier acquéreur est une personne morale qui n’est pas un entrepreneur ou qui n’acquiert pas le bien pour son entreprise.

Lieu de l’acquisition intracommunautaire en cas d’opération triangulaire

(2)      L’acquisition intracommunautaire au sens de l’article 3, paragraphe 8, deuxième phrase, est réputée avoir été soumise à la TVA lorsque l’entrepreneur (acquéreur) démontre qu’il s’agit d’une opération triangulaire et qu’il a rempli ses obligations de déclaration conformément au paragraphe 6. Si l’entrepreneur ne remplit pas ses obligations de déclaration, il perd rétroactivement le bénéfice de l’exonération.

Exonération en cas d’acquisition intracommunautaire de biens

(3)      L’acquisition intracommunautaire est exonérée de TVA lorsque les conditions suivantes sont réunies :

a)      l’entrepreneur (acquéreur) ne réside pas ou n’a pas son siège sur le territoire national, mais est identifié à la TVA sur le territoire de la Communauté ;

b)      l’acquisition est effectuée en vue d’une livraison subséquente de l’entrepreneur (acquéreur) sur le territoire national à un entrepreneur ou une personne morale qui est identifié(e) à la TVA sur le territoire national ;

c)      les biens acquis proviennent d’un autre État membre que celui dans lequel l’entrepreneur (acquéreur) est identifié à la TVA ;

d)      le pouvoir de disposition sur les biens acquis est transmis directement par le premier entrepreneur ou le premier acquéreur au dernier acquéreur (destinataire) ;

e)      la taxe est due par le destinataire conformément au paragraphe 5.

Facturation par l’acquéreur

(4)      La facturation est régie par le droit de l’État membre à partir duquel l’acquéreur exerce son activité. Lorsque la livraison est effectuée à partir de l’établissement stable de l’acquéreur, la loi qui s’applique est celle de l’État membre dans lequel l’établissement stable est situé. Lorsque le destinataire de la livraison à qui la dette fiscale est transférée règle la livraison au moyen d’une note de crédit, la facturation est régie par la loi de l’État membre dans lequel la livraison est effectuée.

Si les dispositions de la présente loi fédérale sont applicables à la facturation, celle-ci doit en outre comporter les indications suivantes :

–        une mention expresse relative à l’existence d’une opération triangulaire intracommunautaire et à la qualité de redevable de la taxe du dernier acquéreur,

–        le numéro d’identification TVA sous lequel l’entrepreneur (acquéreur) a effectué l’acquisition intracommunautaire et la livraison subséquente des biens, et

–        le numéro d’identification TVA du destinataire de la livraison.

Personne redevable de la taxe

(5)      En cas d’opération triangulaire, la taxe est due par le destinataire de la livraison imposable lorsque la facture émise par l’acquéreur correspond au paragraphe 4.

Obligations de l’acquéreur

(6)      Pour remplir ses obligations de déclaration au sens du paragraphe 2, l’entrepreneur doit mentionner, dans l’état récapitulatif, les indications suivantes :

–        le numéro d’identification TVA sur le territoire national sous lequel il a effectué l’acquisition intracommunautaire et la livraison subséquente des biens ;

–        le numéro d’identification TVA du destinataire de la livraison subséquente effectuée par l’entrepreneur, qui lui a été attribué dans l’État membre de destination des biens expédiés ou transportés ;

–        pour chacun de ces destinataires, le montant total des livraisons effectuées de cette manière par l’entrepreneur dans l’État membre de destination des biens expédiés ou transportés. Ces montants doivent être indiqués pour le trimestre civil au cours duquel l’obligation fiscale a pris naissance.

Obligations du destinataire

(7)      Pour calculer la taxe conformément à l’article 20, le montant établi doit être majoré du montant dû au titre du paragraphe 5. »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

15      Luxury Trust Automobil est une société à responsabilité limitée établie en Autriche exerçant des activités de courtage et de vente de véhicules de luxe dans plusieurs pays, tant au sein de l’Union européenne que dans des pays tiers.

16      Au cours de l’année 2014, Luxury Trust Automobil a acheté à un fournisseur établi au Royaume-Uni des véhicules qu’elle a revendus à la société M s. r. o. (ci-après la « société M »), laquelle est établie en République tchèque. Ces véhicules ont été transportés directement du Royaume-Uni en République tchèque.

17      Les entreprises impliquées dans ces livraisons sont intervenues avec le numéro d’identification TVA de leur État d’établissement. Trois factures émises par Luxury Trust Automobil et datées du mois de mars 2014 (ci-après les « factures litigieuses ») mentionnaient donc le numéro d’identification TVA autrichien de cette société, le numéro d’identification TVA tchèque de la société M et le numéro d’identification TVA du fournisseur établi au Royaume-Uni. Ces factures contenaient également la mention « Opération triangulaire intracommunautaire exonérée ».

18      Dans l’état récapitulatif pour le mois de mars de l’année 2014, Luxury Trust Automobil a indiqué le numéro d’identification TVA tchèque de la société M et a déclaré qu’il s’agissait d’opérations triangulaires intracommunautaires.

19      Dans le cadre d’un contrôle fiscal, il a toutefois été constaté que le régime de l’opération triangulaire n’était pas applicable car, contrairement à ce que prescrit l’article 25, paragraphe 4, de l’UStG 1994, les factures litigieuses ne contenaient aucune indication quant au transfert de la dette fiscale. Il y aurait donc eu une opération triangulaire défaillante qui ne pourrait pas être régularisée a posteriori. Compte tenu de l’utilisation du numéro d’identification TVA autrichien de Luxury Trust Automobil, il conviendrait d’admettre l’existence d’une acquisition intracommunautaire en Autriche, conformément à l’article 3, paragraphe 8, de l’UStG 1994. C’est sur la base de ces éléments que l’administration fiscale a fixé, par une décision du 25 avril 2016, la TVA due par Luxury Trust Automobil pour l’année 2014.

20      La juridiction de renvoi indique que, postérieurement à ce contrôle fiscal, Luxury Trust Automobil aurait rectifié les factures litigieuses par des notes rectificatives du 23 mai 2016 en ajoutant à ces factures une mention relative au transfert de la dette fiscale à la société M. Cependant, la preuve de la délivrance effective de ces notes rectificatives à cette société n’existerait pas. En outre, cette dernière serait qualifiée de « Missing Trader » par l’administration fiscale tchèque. En effet, bien que la société M aurait été enregistrée en République tchèque aux fins de la TVA durant la période d’exécution des livraisons en cause, l’administration fiscale tchèque n’aurait pas réussi à la contacter et la société M n’aurait ni déclaré ni versé de TVA en République tchèque au titre de ces livraisons.

21      La décision de l’administration fiscale du 25 avril 2016 a fait l’objet d’une réclamation qui a été rejetée par le Finanzamt Baden Mödling (bureau des contributions de Baden Mödling, Autriche). Luxury Trust Automobil a ensuite formé un recours devant le Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances, Autriche).

22      Selon cette juridiction, l’application des dispositions relatives aux opérations triangulaires n’est pas obligatoire dans une situation telle que celle visée à l’article 25, paragraphe 1, de l’UStG 1994. L’acquéreur intermédiaire d’une opération triangulaire, tel que, en l’occurrence, Luxury Trust Automobil, aurait le droit de choisir si, en ce qui concerne une livraison déterminée, il souhaite ou non que ces dispositions soient appliquées. Ce droit devrait être exercé au moment de la réalisation de l’opération en cause.

23      Dans ce contexte, si cet acquéreur intermédiaire veut obtenir l’exonération d’une acquisition intracommunautaire dans l’État membre de destination et le transfert de la dette fiscale relative à cette acquisition au destinataire final de cette dernière, il devrait établir une facture contenant les indications visées à l’article 25, paragraphe 4, de l’UStG 1994. Or l’indication que le dernier acquéreur est redevable de la TVA, prévue à cette disposition, ne figurait pas sur les factures litigieuses.

24      L’article 25 de l’UStG 1994 ne serait, par conséquent, pas applicable, de sorte que l’opération en cause devrait être traitée au regard des dispositions générales de cette loi. En vertu de celles-ci, puisque Luxury Trust Automobil a utilisé son numéro d’identification TVA autrichien, elle a procédé à une acquisition intracommunautaire en Autriche. L’acquisition devrait ainsi être considérée comme ayant été réalisée en Autriche jusqu’à ce que cette société démontre que cette acquisition a été imposée en République tchèque. Cette condition n’étant pas remplie, ladite société n’aurait pas droit à la déduction de la TVA en amont au titre de ladite acquisition.

25      Luxury Trust Automobil a introduit un recours en Revision contre le jugement du Bundesfinanzgericht (tribunal fédéral des finances) devant le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche), qui est la juridiction de renvoi dans la présente affaire.

26      Le litige au principal porte sur l’imposition due au titre de l’article 3, paragraphe 8, deuxième phrase, de l’UStG 1994, c’est-à-dire sur la taxation supplémentaire d’une acquisition intracommunautaire réputée comme telle en raison de l’utilisation d’un numéro d’identification TVA autrichien.

27      Dans ce contexte, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) relève trois difficultés.

28      Premièrement, cette juridiction constate qu’il découle de l’article 41, premier alinéa, de la directive TVA qu’une acquisition intracommunautaire est réputée avoir lieu sur le territoire de l’État membre ayant attribué le numéro d’identification TVA utilisé aux fins de cette acquisition. Toutefois, conformément à l’article 42 de cette directive, tel ne serait pas le cas lorsque le destinataire d’une livraison subséquente a été désigné comme étant redevable de la TVA au titre de l’article 197 de ladite directive.

29      À cet égard, l’article 197, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA prévoirait que la facture afférente à une telle opération doit être établie conformément aux dispositions des sections 3 à 5 du chapitre 3 du titre XI de cette directive.

30      Il y aurait donc « désignation » du destinataire d’une livraison comme étant redevable de la TVA, au sens de l’article 42 de ladite directive, lorsque la facture contient une indication telle que celle mentionnée à l’article 226, point 11 bis, de la même directive, c’est-à-dire la mention « Autoliquidation ».

31      Toutefois, la juridiction de renvoi considère que si le considérant 7 de la directive 2010/45 plaide en faveur d’un respect strict des dispositions relatives à la facturation, l’objectif de la mention « Autoliquidation » sur les factures relatives à des opérations triangulaires est d’assurer que le dernier acquéreur dans le cadre d’une telle opération puisse clairement et aisément reconnaître que la dette fiscale lui est transférée. Or, selon cette juridiction, cet objectif peut également être assuré par la mention « opération triangulaire intracommunautaire exonérée » figurant sur les factures litigieuses, et cela d’autant plus s’il est tenu compte du fait que celles-ci n’indiquent aucun montant de TVA, mais que le montant mentionné sur ces factures est expressément désigné comme étant le « montant net de la facture ».

32      Dans ces circonstances, il ne serait pas exclu que la mention initiale figurant sur les factures litigieuses puisse satisfaire aux conditions prévues par le droit de l’Union pour la désignation du destinataire d’une livraison comme étant redevable de la TVA.

33      Deuxièmement, si tel ne devait pas être le cas, la juridiction de renvoi relève que, au point 49 de son arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler (C-580/16, EU:C:2018:261), la Cour a jugé que l’article 42, sous a), de la directive TVA porte sur la condition de fond requise pour qu’une acquisition telle que celle en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt soit réputée soumise à la TVA, conformément à l’article 40 de cette directive. En revanche, l’article 42, sous b), de ladite directive préciserait les modalités relatives à la preuve de la taxation dans l’État membre de destination, lesquelles devraient être considérées comme étant des conditions formelles.

34      L’une des conditions matérielles au titre de cet article 42, sous a), exigerait que le destinataire d’une livraison en vertu de l’article 197 de la directive TVA ait été désigné comme étant redevable de la TVA sur la facture relative à cette livraison.

35      Dans ces circonstances, les factures devraient, en ce qui concerne une déduction de la taxe en amont, être considérées comme constituant des conditions formelles pouvant, en règle générale, être rectifiées, la rectification s’appliquant rétroactivement à l’année au cours de laquelle la facture a été initialement établie. En outre, même si la TVA a été facturée à tort, une facture pourrait être rectifiée si son auteur démontre sa bonne foi ou a entièrement écarté, en temps utile, le risque de perte de recettes fiscales.

36      La juridiction de renvoi se demande néanmoins si une telle possibilité de rectification existe également à l’égard d’une condition matérielle, et ce d’autant plus que l’application de la réglementation relative aux opérations triangulaires n’est pas contraignante, les assujettis pouvant décider de ne pas faire usage du régime de simplification que cette réglementation instaure.

37      Dans ce contexte, il conviendrait également de déterminer s’il suffit que l’auteur d’une facture la rectifie et l’envoie au destinataire de la livraison en cause ou s’il faut, en outre, que la rectification parvienne à ce dernier. L’éventuel effet rétroactif d’une telle rectification devrait également être déterminé, conformément à l’arrêt du 15 septembre 2016, Senatex (C-518/14, EU:C:2016:691).

38      Troisièmement, la juridiction de renvoi relève que Luxury Trust Automobil invoque l’applicabilité du droit tchèque. Celui-ci, contrairement au droit autrichien, n’exigerait pas que les factures contiennent une mention relative au transfert de la dette fiscale. La détermination du droit applicable nécessiterait néanmoins l’interprétation de l’article 219 bis de la directive TVA.

39      Dans ces circonstances, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      L’article 42, sous a), de la directive [TVA], lu en combinaison avec l’article 197, paragraphe 1, sous c), de cette directive [...] doit-il être interprété en ce sens qu’il y a aussi désignation du destinataire de la livraison comme redevable de la taxe lorsque la facture qui n’indique aucun montant de TVA fait mention d’une “opération triangulaire intracommunautaire exonérée” ?

2)      En cas de réponse négative à la première question :

a)      Une telle mention sur la facture peut-elle être valablement rectifiée a posteriori (par l’indication “opération triangulaire intracommunautaire au titre de l’article 25 de l’UstG [1994]. La dette fiscale est transférée au destinataire de la prestation”) ?

b)      Est-il nécessaire pour une rectification valable que la facture rectifiée parvienne à son destinataire ?

c)      L’effet de la rectification intervient-il rétroactivement à compter du moment de l’établissement de la facture initiale ?

3)      L’article 219 bis de la directive [TVA] doit-il être interprété en ce sens qu’il convient d’appliquer les dispositions relatives à la facturation de l’État membre dont les dispositions devraient être appliquées s’il n’y avait pas (encore) de désignation d’un “acquéreur” comme redevable de la taxe dans la facture ; convient-il sinon d’appliquer les dispositions de l’État membre dont les dispositions devraient être appliquées si on admettait la désignation valable de l’“acquéreur” comme redevable de la taxe ? »

 Sur les questions préjudicielles

 Sur la première question

40      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 42, sous a), de la directive TVA, lu en combinaison avec l’article 197, paragraphe 1, sous c), de cette directive, doit être interprété en ce sens que, dans le cadre d’une opération triangulaire, l’acquéreur final est valablement désigné comme étant redevable de la TVA lorsque la facture émise par l’acquéreur intermédiaire ne contient pas la mention « Autoliquidation ».

41      À titre liminaire, il convient de rappeler qu’une opération triangulaire est une opération par laquelle un bien est livré par un fournisseur, identifié à la TVA dans un premier État membre, à un acquéreur intermédiaire, identifié à la TVA dans un deuxième État membre, qui, à son tour livre ce bien à un acquéreur final, identifié à la TVA dans un troisième État membre, ledit bien étant directement transporté du premier État membre au troisième État membre.

42      Cette opération triangulaire peut bénéficier d’un régime dérogatoire à la règle, énoncée à l’article 2, paragraphe 1, sous b), de la directive TVA, selon laquelle les acquisitions intracommunautaires de biens effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre sont soumises à la TVA (voir, en ce sens, arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, point 27).

43      Ce régime dérogatoire consiste, d’une part, à exonérer l’acquisition intracommunautaire effectuée par l’acquéreur intermédiaire, qui est identifié à la TVA dans le deuxième État membre et, d’autre part, à reporter la taxation de cette acquisition au niveau de l’acquéreur final, établi et identifié à la TVA dans le troisième État membre, l’acquéreur intermédiaire étant dispensé de l’obligation d’identification à la TVA dans ce dernier État membre. Ledit régime résulte de l’articulation entre la règle prévue à l’article 40 de cette directive et la dérogation qui découle de l’article 42 de celle-ci.

44      En effet, l’article 40 de la directive TVA énonce la règle selon laquelle le lieu de taxation d’une acquisition intracommunautaire est l’endroit où les biens se trouvent au moment de l’arrivée de l’expédition ou du transport à destination de l’acquéreur. Afin de garantir la correcte application de cette règle, l’article 41 de cette directive prévoit que, lorsque l’acquéreur n’établit pas que l’acquisition a été soumise à la TVA conformément à l’article 40 de ladite directive, le lieu de l’acquisition intracommunautaire est réputé se situer sur le territoire de l’État membre qui a attribué le numéro d’identification TVA sous lequel l’acquéreur a effectué l’acquisition.

45      L’article 42 de la même directive déroge à l’application de ladite règle dans le cadre des opérations triangulaires définies à l’article 141 de la directive TVA lorsque, d’une part, l’acquéreur établit avoir effectué l’acquisition intracommunautaire en cause pour les besoins d’une livraison subséquente, effectuée sur le territoire de l’État membre déterminé conformément à l’article 40 de cette directive et pour laquelle le destinataire a été désigné comme étant redevable de la taxe conformément à l’article 197 de ladite directive, et que, d’autre part, l’acquéreur a rempli les obligations relatives au dépôt de l’état récapitulatif prévues à l’article 265 de la même directive.

46      Conformément à l’article 197, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA, la facture émise par l’acquéreur intermédiaire doit être établie conformément aux dispositions des sections 3 à 5 du chapitre 3 du titre XI de cette directive. Parmi ces dispositions, l’article 226, point 11 bis, de ladite directive impose que la facture contienne la mention « Autoliquidation » lorsque l’acquéreur ou le preneur est redevable de la TVA.

47      Dans ce cadre, afin de répondre à la première question, il importe de tenir compte non seulement des termes de l’article 42, sous a), de la directive TVA, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont cette disposition fait partie (voir, en ce sens, arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, point 33).

48      Premièrement, en ce qui concerne le libellé de l’article 42 de la directive TVA, il découle de celui-ci, d’une part, qu’il s’agit d’une dérogation à l’article 41, premier alinéa, de cette directive et, d’autre part, que l’application de cette dérogation est subordonnée à la réunion des deux conditions cumulatives prévues à cet article 42, sous a) et b) (voir, en ce sens, arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, point 45).

49      Tandis que l’article 42, sous a), de la directive TVA précise la condition de fond requise pour qu’une acquisition réalisée dans le cadre d’une opération triangulaire soit réputée soumise à la TVA conformément à l’article 40 de cette directive, l’article 42, sous b), de ladite directive énonce les conditions formelles selon lesquelles la preuve de la taxation dans l’État membre de destination du transport ou de l’expédition intracommunautaire doit être rapportée (voir, en ce sens, arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, point 49).

50      Deuxièmement, s’agissant du contexte dans lequel s’inscrit l’article 42 de la directive TVA, il ressort de la jurisprudence de la Cour que cet article précise et complète les conditions d’application de la mesure de simplification prévue à l’article 141 de cette directive (voir, en ce sens, arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, point 37). Or tant l’article 42, sous a), de la directive TVA que l’article 141, sous e), de cette directive renvoient à l’article 197 de ladite directive, lequel impose à son tour le respect des dispositions du chapitre 3 du titre XI de la même directive, dont l’article 226 de cette dernière fait partie.

51      Il s’ensuit que, dans le cadre spécifique du régime dérogatoire applicable aux opérations triangulaires, l’acquéreur intermédiaire d’une opération triangulaire ne saurait substituer une autre indication à la mention « Autoliquidation » alors que l’article 226, point 11 bis, de la directive TVA impose expressément cette mention.

52      Troisièmement, les objectifs poursuivis par le régime dérogatoire visé aux articles 42 et 141 de la directive TVA confortent cette interprétation.

53      En effet, si l’objet de l’article 141 de cette directive est d’éviter à l’acquéreur intermédiaire d’avoir à satisfaire à des obligations d’identification et de déclaration dans l’État membre de destination des biens (arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, point 41), les articles 41 et 42 de ladite directive visent à garantir l’assujettissement à la TVA de l’acquisition intracommunautaire en cause au niveau de l’acquéreur final, tout en évitant la double taxation de cette opération (arrêt du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, point 50 et jurisprudence citée).

54      Or, comme Mme l’avocate générale l’a relevé au point 46 de ses conclusions, la raison d’être des mentions que doit comporter une facture au titre de l’article 226 de la directive TVA est d’informer son destinataire de la qualification juridique de l’opération réalisée par son émetteur. Cet objectif est d’autant plus impérieux lorsque cet émetteur estime que, à titre exceptionnel, ce n’est pas lui mais le destinataire de la livraison qui est redevable de la TVA.

55      Le régime dérogatoire prévu aux articles 42 et 141 de la directive TVA étant facultatif, c’est la formalité requise à l’article 226, point 11 bis, de cette directive qui permet de garantir que le destinataire final d’une livraison a connaissance de ses obligations fiscales. En effet, la caractéristique du régime de l’autoliquidation tient précisément au fait que si aucun paiement de la TVA n’a lieu entre le fournisseur et l’assujetti destinataire d’une livraison, c’est parce que ce dernier est redevable de cette taxe au titre de cette livraison (voir, en ce sens, arrêt du 2 juillet 2020, Terracult, C-835/18, EU:C:2020:520, point 22). Il ne saurait dès lors y avoir d’incertitude à cet égard.

56      Compte tenu des motifs qui précèdent, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 42, sous a), de la directive TVA, lu en combinaison avec l’article 197, paragraphe 1, sous c), de cette directive, doit être interprété en ce sens que, dans le cadre d’une opération triangulaire, l’acquéreur final n’a pas été valablement désigné comme étant redevable de la TVA lorsque la facture émise par l’acquéreur intermédiaire ne contient pas la mention « Autoliquidation », visée à l’article 226, point 11 bis, de ladite directive.

 Sur la deuxième question

57      Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 226, point 11 bis, de la directive TVA doit être interprété en ce sens que l’omission, sur une facture, de la mention « Autoliquidation » requise à cette disposition peut être rectifiée ultérieurement par l’ajout d’une indication précisant que cette facture concerne une opération triangulaire intracommunautaire et que la dette fiscale est transférée au destinataire de la livraison.

58      En cas de réponse positive à cette deuxième question, cette juridiction demande, d’une part, si la validité d’une telle rectification est subordonnée au fait qu’elle parvienne à son destinataire et, d’autre part, si la facture ainsi rectifiée a un effet rétroactif à la date de l’établissement de la facture initiale.

59      À cet égard, il convient de rappeler que, si la Cour a reconnu que le principe fondamental de neutralité de la TVA exige que la déduction ou le remboursement de la TVA en amont soit accordé alors même que certaines exigences formelles ont été omises par les assujettis, c’est à la condition que les exigences de fond aient par ailleurs été satisfaites (voir, en ce sens, arrêts du 27 septembre 2007, Collée, C-146/05, EU:C:2007:549 point 31 ; du 19 avril 2018, Firma Hans Bühler, C-580/16, EU:C:2018:261, points 50 et 51, ainsi que du 21 octobre 2021, Wilo Salmson France, C-80/20, EU:C:2021:870, point 76).

60      Il s’agit, en effet, de taxer les opérations en cause en prenant en considération leurs caractéristiques objectives (voir, en ce sens, arrêt du 27 septembre 2007, Collée, C-146/05, EU:C:2007:549, point 30 et jurisprudence citée).

61      Il ne saurait, par conséquent, être question d’une rectification de la facture lorsqu’une condition d’application du régime dérogatoire applicable aux opérations triangulaires, telle que la mention requise à l’article 226, point 11 bis, de la directive TVA, fait défaut. Comme Mme l’avocate générale l’a relevé aux points 57 et 61 de ses conclusions, la réalisation a posteriori d’une condition d’application nécessaire au transfert de la dette de TVA au destinataire d’une livraison ne constitue pas une rectification. Il s’agit de la première émission de la facture requise, laquelle ne saurait avoir d’effet rétroactif.

62      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question que l’article 226, point 11 bis, de la directive TVA doit être interprété en ce sens que l’omission, sur une facture, de la mention « Autoliquidation » requise à cette disposition ne peut pas être rectifiée ultérieurement par l’ajout d’une indication précisant que cette facture concerne une opération triangulaire intracommunautaire et que la dette fiscale est transférée au destinataire de la livraison.

 Sur la troisième question

63      Par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 219 bis de la directive TVA doit être interprété en ce sens qu’il impose d’appliquer les dispositions relatives à la facturation de l’État membre de l’acquéreur intermédiaire ou celles de l’État membre de l’acquéreur final.

64      La juridiction de renvoi s’interroge sur ce point car, dans le cadre de la procédure au principal, Luxury Trust Automobil fait valoir que c’est le droit tchèque qui devrait être appliqué. Or celui-ci n’exigerait pas que les factures contiennent une mention relative au transfert de la dette fiscale.

65      Il ressort toutefois des réponses données aux deux premières questions que la réponse à la troisième question ne saurait avoir d’incidence sur l’issue du litige au principal.

66      En effet, en raison de l’absence de la mention « Autoliquidation » sur les factures litigieuses, la désignation de l’acquéreur final comme étant redevable de la TVA n’a pas été valablement opérée. L’acquéreur intermédiaire doit, par conséquent, être considéré comme étant redevable de cette taxe dans l’État membre lui ayant attribué le numéro d’identification qu’il a utilisé aux fins de l’acquisition intracommunautaire en cause, conformément à l’article 41, premier alinéa, de la directive TVA.

67      En tout état de cause, les exigences énoncées à l’article 42, à l’article 141, sous e), et à l’article 226, point 11 bis, de la directive TVA ne sauraient varier d’un État membre à un autre. La juridiction de renvoi a l’obligation d’interpréter le droit applicable au litige au principal, qu’il s’agisse du droit de l’État membre de l’acquéreur intermédiaire ou de celui de l’acquéreur final, conformément au droit de l’Union (voir, par analogie, arrêt du 18 novembre 2020, DelayFix, C-519/19, EU:C:2020:933, point 51).

68      Au regard des motifs qui précèdent, il n’y a donc pas lieu de répondre à la troisième question.

 Sur les dépens

69      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) dit pour droit :

1)      L’article 42, sous a), de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telle que modifiée par la directive 2010/45/UE du Conseil, du 13 juillet 2010, lu en combinaison avec l’article 197, paragraphe 1, sous c), de la directive 2006/112, telle que modifiée,

doit être interprété en ce sens que :

dans le cadre d’une opération triangulaire, l’acquéreur final n’a pas été valablement désigné comme étant redevable de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) lorsque la facture émise par l’acquéreur intermédiaire ne contient pas la mention « Autoliquidation », visée à l’article 226, point 11 bis, de la directive 2006/112, telle que modifiée.

2)      L’article 226, point 11 bis, de la directive 2006/112, telle que modifiée par la directive 2010/45,

doit être interprété en ce sens que :

l’omission, sur une facture, de la mention « Autoliquidation » requise à cette disposition, ne peut pas être rectifiée ultérieurement par l’ajout d’une indication précisant que cette facture concerne une opération triangulaire intracommunautaire et que la dette fiscale est transférée au destinataire de la livraison.

Signatures


*      Langue de procédure : l’allemand.